Le marché de la fabrication additive continue d’être à la peine. Dans son dernier rapport pour la période Q2 2024, le cabinet d’études Context confirme un peu ce qu’il avait pu observer au dernier trimestre 2023 et 1er trimestre 2024, c’est à dire une baisse globale des expéditions d’imprimantes 3D industrielles, tandis que les machines d’entrée de gamme sont en plein boom.
Au 2ème trimestre 2024, le segment industriel continue en effet d’accuser le coup, avec des expéditions qui ont chuté de 25 % par rapport à l’année précédente, marquant ainsi le quatrième trimestre consécutif de baisse. Dans la lignée de ce qui avait été observé ces derniers trimestres, ce segment a continué à lutter contre la faiblesse des expéditions mondiales de systèmes polymères, en particulier ceux exploitant la photopolymérisation.
Les chiffres décevants du segment industriel auraient pu être encore plus alarmants sans les bons résultats des machines de fabrication additive métallique. À nouveau, le secteur a été porté par les expéditions nationales des machines chinoises à fusion sur lit de poudre métallique (PBF). Sur un an elles ont augmenté de 7 %. Bien que ce ne soit pas vraiment précisé, il est fort à parier que les systèmes industriels grand format multi-lasers, comptent pour beaucoup dans cette croissance. Plusieurs rapports ont rapporté la montée en puissance de ces technologies.
Selon Context, les fournisseurs chinois (vendant principalement sur le marché intérieur) ont représenté 53 % de tous les systèmes PBF métalliques industriels expédiés au cours de la période, mais seulement 32 % des revenus. « Toutefois, la croissance dans cette région semble ralentir. » Indique le cabinet d’études. « Seulement 5 % d’imprimantes supplémentaires ont été expédiées depuis la Chine au T2-24 par rapport au T2-23 (à comparer aux 19 %, 38 % et 45 % de croissance en glissement annuel des trois trimestres précédents). Sur la période, BLT a été le leader mondial des expéditions de systèmes PBF métalliques industriels (unités), EOS occupant à nouveau la première place en termes de revenus de systèmes. »
Les fournisseurs occidentaux de machines PBF métalliques industrielles ont enregistré une légère amélioration de leurs expéditions en glissement annuel, mais avec une baisse globale de 2 %. Parmi les « bons élèves » du secteur, TRUMPF et Colibrium/GE Aerospace ont vu leurs expéditions augmenter respectivement de 22 % et 35 %, tandis que Nikon SLM Solutions, malgré une baisse de ses expéditions, a connu une forte croissance de plus de 30 % de son chiffre d’affaires grâce à la popularité de ses systèmes NXG. Rappelons que le motoriste français Safran, par exemple, s’est doté en 2023 de la fameuse NXG XII 600, une imprimante 3D métal industrielle très grand format dotée de douze lasers de 1 KW capables de fonctionner simultanément.
Le plus grand défi dans cette catégorie des systèmes à plus de 100 000 $, où les expéditions totales ont chuté de −36 % par rapport à l’année précédente, est venu une fois de plus des faibles niveaux d’expéditions des machines exploitant la photopolymérisation. Celles-ci ont chuté de −47 % dans l’ensemble, avec de faibles expéditions à la fois de fournisseurs chinois (le leader du marché UnionTech a connu une baisse notable par rapport à l’année précédente) ainsi que de fabricants d’équipements d’origine occidentaux (OEM). « En particulier, 3D Systems continue de lutter, car son principal client a été freiné par la faiblesse de la demande en aval, l’inflation ayant détourné les dépenses de consommation des procédures dentaires cosmétiques. » Peut-on lire dans le rapport.
94 % des expéditions dans cette catégorie à -2 500 $ provenaient des 4 fournisseurs chinois
Les résultats en baisse du segment professionnel ont quant à eux été contenus par les imprimantes 3D d’entrée de gamme dont les expéditions ont explosé de 65 %. Le champion de l’impression 3D résine Formlabs, serait en bonne partie à l’origine de ce succès. Pour expliquer cela, Context évoque les lancements réussis d’un « nouveau produit de Formlabs« . Le cabinet doit certainement faire allusion à sa dernière génération d’imprimantes : la Form 4. Ce qui n’aurait rien d’étonnant au vu de son gap technologique par rapport à l’ancienne génération Form 3, en particulier sa vitesse d’impression qui a été multipliée par 5.
Le rapport nous en apprend également plus sur la répartition des procédés et le fameux duels entre le FFF (dépôt de matière fondue) et système d’impression 3D résine. Si le secteur professionnel a longtemps favorisé les imprimantes 3D FFF, avec un ratio de 65/35 par rapport aux imprimantes 3D à photopolymérisation, au deuxième trimestre 2024, une répartition des expéditions plus équilibrée, proche de 50/50, a été observée. Une évolution logique étant donné la croissance du marché des imprimantes 3D FFF d’entrée de gamme, moins coûteuses, tandis que les expéditions de systèmes d’extrusion professionnels ont chuté de 21 %. Dans le même temps, les expéditions d’imprimantes 3D résine ont connu une hausse de 6 %.
Mais il y a plus surprenant encore ! Les fabricants de machines d’entrée de gamme bon marché, c’est à dire à moins de 2 500 €, ont explosé leurs résultats. Comme attendu, les marques chinoises confirment leur leadership. Tandis que les revenus de Creality ont augmenté de 64 % sur un an, ceux de Bambu Lab ont bondi de 336 % !
En termes de parts de marché, ces fabricants représentent respectivement 47 % et 26 % des revenus, soit 73 % à eux deux ! « Au total, 94 % des expéditions dans cette catégorie inférieure à 2 500 $ provenaient des 4 principaux fournisseurs : Creality, Bambu Lab, Anycubic et Elegoo. » indique Context. Cela signifie que les fabricants tels que l’emblématique Prusa Research, ne se partagent les miettes que des 6 % restants…
Si on regarde du côté des revenus générés durant cette période, l’augmentation de 7 % des recettes mondiales a été entièrement soutenue par la forte hausse des expéditions d’imprimantes d’entrée de gamme. Leurs revenus ont augmenté de 58 % par rapport au deuxième trimestre 2023. En revanche, tous les autres segments ont enregistré une baisse par rapport à l’année précédente, avec une diminution particulièrement marquée dans le segment professionnel, en recul de 21 %. La baisse de 17 % des revenus des imprimantes industrielles reste cependant la plus préoccupante.
Les imprimantes d’entrée de gamme ont représenté 48 % des revenus mondiaux des systèmes ce trimestre, dépassant ainsi les systèmes industriels (38 %) et devenant ainsi la catégorie de prix la plus rentable.
Si Context ne se prononce pas sur les perspectives de l’année 2025, d’autres analystes tels que dernièrement AMR (Additive Manufacturing Research), estime qu’elle devrait marquer une véritable reprise, avec une augmentation de 30 % des expéditions d’imprimantes 3D. Une croissance qui serait favorisée par la baisse anticipée des taux d’intérêt, combiné à un phénomène de rattrapage sur des ventes anormalement basses sur les dernières périodes.