Très prisé de l’industrie du fait ses nombreuses propriétés que sont notamment l’élasticité, la biocompatibilité, la résistance chimique et aux températures, sans oublier son caractère hydrophobe, le silicone est un matériau que les fabricants d’imprimantes 3D ont longtemps rêver de pouvoir s’approprier.
Une mission pour le moins semée d’embûches. En plus de sa nature visqueuse, le spécialiste français de l’impression 3D silicone Lynxter nous expliquait que la difficulté avec ce polymère, est qu’il est non thermoplastique. Cela signifie qu’il n’est pas possible de fondre un filament pour pouvoir l’imprimer. Pour y parvenir, la solution mise en oeuvre par la plupart des rares fabricants présents sur ce créneau, a consisté notamment à ajouter des agents de durcissement au silicone liquide. Une approche le plus souvent incarnée par le dépôt de matière. Les autres méthodes additives qui ont permis de dompter le silicone, a consisté à combiner le jet de matière avec le durcissement par UV. Plus récemment on a également vu arriver ce nouveau procédé particulièrement novateur de 3Deus Dynamics, fonctionnnant par moulage dynamique.
Sur ce segment naissant aux secrets jalousement gardés par une poignée de fabricants, un nouvel arrivant vient de faire son entrée. Une surprise répondant au nom de Prayasta, une start-up indienne qui a mis au point une imprimante 3D spécialement développée pour les élastomères de qualité implantaire, dont le silicone.
Depuis 2017, date de sa création, cette jeune pousse basée à Bengaluru a travaillé sur le développement d’une technologie additive permettant de traiter ce type de matériaux. Une ambition derrière laquelle se cache l’idée de pouvoir imprimer des prothèses mammaires personnalisées. L’idée étant de pouvoir proposer des dispositifs pouvant s’adapter parfaitement à la morphologie de chaque patient en termes de taille, de forme et de poids. Une solution qui n’est pas sans faire échos à d’autres initiatives sur les prothèses mammaires imprimées en 3D. On pense bien sûr à celles du français Lattice Medical. La grande différence est que celui-ci a mis au point des bioprothèses de reconstruction entièrement dégradables.
« Les imprimantes conventionnelles ne peuvent pas traiter le silicone de qualité implantable en raison de sa nécessité inhérente de réticulation en deux parties »
La première née de Prayasta se nomme Silimac P250, une imprimante 3D industrielle véritablement taillée pour la production. Le fabricant affirme qu’elle peut contenir jusqu’à 14 000 ml de matériau dans une seule recharge. Au niveau de la chambre d’impression, l’imprimante comprend également un système de stérilisation UV intégrée, ainsi qu’un système de support sans contamination qui facilite le niveau d’hygiène requis pour l’impression 3D d’implants.
« L’imprimante 3D Silimac P250 a une conception méticuleuse qui maintient la stérilité de l’environnement d’impression et du matériau produisant des produits de meilleure qualité adaptés aux applications médicales et aux implantations à long terme« , a déclaré Vikas Garg, CTO, et co-fondateur de Prayasta.
Concernant la conception, Prayasta explique s’être appuyé sur une méthodologie de conception baptisée « Novel Internal Architecture ». Celle-ci a pour vocation à rendre les prothèses mammaires résistantes à la rupture et suturables en éliminant respectivement les risques de fuite et de déplacement post-implantation. L’entreprise indienne précise que sa technologie peut servir à d’autres type d’implants pour tissus mous tels que les implants nasaux, auriculaires, mentonniers, malaires, labiaux, trachéobronchiques, œsophagiens, etc. ainsi que des prothèses externes pour tissus mous.
Pour l’heure peu bavarde sur sa technologie « Implant-grade Elastomer Additive Manufacturing » (iEAM), Prayasta fournit néanmoins quelques indications allant dans le sens d’un procédé d’impression 3D par photopolymérisation. La start-up évoque un processus additif réalisé grâce à une polymérisation en temps réel ainsi qu’à un laser IR et à des éléments chauffants. Le plus intéressant réside dans une vidéo publiée sur son site où l’on peut voir l’impression d’une prothèse mammaire. On constate l’utilisation d’un procédé par dépôt de matière qui consiste plus exactement à déposer le matériau à l’aide d’une seringue. Enfin, les quelques autres spécifications dévoilées par le fabricant font état d’un volume de fabrication de 250 x 250 x 250 mm, et d’une résolution de 50 microns.
La technologie développée par Prayasta sera d’autant plus intéressante à surveiller qu’on apprend qu’une collaboration avec l’Indian Institute of Science (IISc) a été mise en place. Elle permettra d’évaluer l’imprimabilité 3D de nouveaux matériaux et de développer les compétences nécessaires pour la pénétration du marché de la fabrication additive. « Le silicone est l’un des meilleurs matériaux implantables aujourd’hui et pourtant il n’est pas imprimable en 3D. » Conclut Vikas Garg, CTO, et co-fondateur de Prayasta. « Les imprimantes conventionnelles ne peuvent pas traiter le silicone de qualité implantable en raison de sa nécessité inhérente de réticulation en deux parties, de son facteur de forme et de sa viscosité extrêmement élevée. C’est pourquoi nous avons adopté une nouvelle approche et développé une nouvelle technologie d’impression 3D à partir de zéro. »