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Nikon : 622 millions d’euros pour devenir un poids lourd de l’impression 3D métal

662 millions d’euros, c’est la somme rondelette que Nikon Corporation s’apprête à débourser pour mettre la main sur un poids lourd de l’impression 3D métal : le géant allemand SLM Solutions. Une opération qui nous confirme les ambitions élevées et mondiales du mastondonte japonais sur le marché très convoité de la fabrication additive métallique.

La société rejoint ainsi d’autres multinationales et géants numériques (HP, GE…), venus contester le leadership des fabricants historiques de ce marché. Une preuve de plus, si l’en fallait une, que l’impression 3D est un gâteau en pleine expansion dont chacun cherche à gagner sa part.

Plus connu du grand public pour ses appareils photos reflex, Nikon possède une expertise reconnue et incontournable en matière d’optique et d’imagerie numérique. Un savoir-faire historique qui permet à la société d’être présente sur de nombreux secteurs d’activités. Microscopes, télescopes, systèmes de capture et d’imagerie médicale, ou encore steppers LCD, ne sont quelques uns des multiples domaines industriels et scientifiques où la multinationale niponne rayonne.

Celui que l’on connaît aujourd’hui sous le nom de Nikon, se nommait initialement « Nippon Kogaku Kogyo » (Optique japonaise SA). Un nom qui remonte précisément à sa création en 25 juillet 1917, date à laquelle la société s’est lancée dans l’optique industrielle. Il faudra attendre une trentaine d’années, soit après la fin de la seconde guerre mondiale, pour que l’entreprise n’entreprenne sa transition vers les produits de grandes consommation sous la marque Nikon.

Exemple de système de tomographie et d'inspection développé par Nikon

L’un des systèmes de tomographie et d’inspection développé par Nikon (crédits photo : Nikon)

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, Nikon entretien depuis longtemps un lien étroit avec l’impression 3D. Dans le monde de la fabrication additive, Nikon est connu pour ses systèmes d’inspection et de métrologie. La société propose des équipements de Tomographie Numérique (TN) à rayon X qui permettent de repérer toutes les anomalies pouvant se rencontrer dans une impression 3D, comme des porosités ou des fissures. La complexité géométrique qui caractérise les pièces imprimées en 3D (canaux, formes entrelacées, cavités…) nécessite en effet des techniques 3D volumiques pour contrôler leur structure interne.

C’est ainsi qu’en 2019, Nikon a décidé de lancer sa première solution de fabrication additive métallique. Une machine à fusion laser sur lit de poudre baptisée Lasermeister 100A, qui tire parti des technologies d’inspection du fabricant japonais pour corriger automatiquement les défauts les plus courants rencontrés avec la fusion de poudres métalliques. En plus de ses capacités additives, cette imprimante bénéficie d’une grande polyvalence de traitements laser, notamment le marquage, le soudage et même le polissage. 

Nous fournissant de précieuses indications sur les domaines d’applications visés par Nikon en mettant la main sur SLM Solutions, rappelons qu’il y a deux ans la société avait fait l’acquisition d’un service d’impression 3D métal. Une entreprise américaine dénommée Morph3D, plus exactement spécialisée dans les pièces additives pour l’aérospatiale. Sa solide expérience en matière de production en série et sa capacité à concevoir des structures fonctionnelles avaient fini par taper dans l’oeil du géant nippon.

La Lasermeister 100A, première solution de fabrication additive métallique développée par Nikon

La Lasermeister 100A, première solution de fabrication additive métallique développée par Nikon (crédits photo : Nikon)

Rendue publique vendredi dernier, l’acquisition de SLM Solution s’est quant à elle concrétisée par une prise de participation majoritaire de 61,10 % de l’ensemble du capital-actions de la société allemande. Une offre de reprise dont on apprend qu’elle sera effective pour fin septembre ou début octobre 2022. De quoi réjouir les actionnaires de l’entreprise de Lübec, qui après l’annonce, ont vu leur mise bondir de plus de 70 %.

En s’accaparant l’un des plus gros poids lourds mondiaux en termes de fabrication additive métallique, Nikon réalise un très beau coup. Rappelons qu’avant lui, d’autres s’y étaient déjà cassé les dents. Le plus connu étant General Electric qui en 2016 avait fini par échouer en raison de l’acceptation minimale. Le géant américain s’était finalement rabattu sur Concept Laser et Arcam.

Outre l’objectif déclaré de vouloir créer ensemble une entreprise de fabrication numérique, le rapprochement de deux tels mastodontes et de leurs technologies nous fait espérer de passionnantes avancées pour la fabrication additive métallique.

Il n’y a qu’à voir la technologie LPBF dont dispose déjà SLM Solution. L’exemple le plus parlant si vous ne le connaissez pas encore, étant son système NXG XII 600. Une imprimante 3D géante, qui en plus de son gros volume de fabrication (600 x 600 x 600 mm), peut compter sur la présence douze lasers de 1 KW capables de fonctionner simultanément. Une faculté qui lui permet d’être 20 fois plus rapide qu’un système à laser unique telle que la SLM 280. Le fabricant allemand estime qu’au maximum de ses capacités (1000 cm3 / h), cette plateforme pourrait produire plus de 10 000 kg de pièces par an.

« L’impression 3D va révolutionner la production de masse en permettant à nos clients de fabriquer des pièces très complexes… »

Plateforme NXG XII 600 de SLM Solutions installée en novembre 2021 par Morf3D

Plateforme NXG XII 600 de SLM Solutions installée en novembre 2021 par Morf3D (crédits photo : SLM Solutions)

La NXG XII 600 peut par ailleurs compter sur une multitude de fonctionnalités inédites comme la fonction « Zoom », un système à double lentille qui permet aux utilisateurs de choisir entre différentes tailles de points laser. Ou encore la possibilité d’imprimer sans supports des pièces courtes en surplomb, jusqu’à cinq degrés.

Au regard du portefeuille technologique dont dispose Nikon en matière d’optique, les perspectives de développement sont passionnantes pour SLM Solutions. Nul doute que le géant japonais a toutes les cartes en main pour faire progresser le fabricant allemand sur de nombreux aspects. Qu’il s’agisse d’augmentation de puissance de ses lasers, ou bien de gain en termes de précisions et de fiabilité, les possibilités d’améliorations sont nombreuses.

Un sentiment que partage PDG de SLM, Sam O’Leary : « Nikon a plus d’un siècle d’histoire dans le développement de technologies optoélectroniques de pointe et d’équipements de précision. Je suis ravi que SLM s’associe à Nikon pour renforcer notre position de leader technologique. Nous pensons que cette transaction et ce partenariat seront très bénéfiques pour toutes nos parties prenantes – actionnaires, employés et clients.« 

Au-delà la complémentarité de leurs technologies et la mise en commun de leur R&D, les deux entreprises, cela va de soi, entendent également augmenter le marketing et la vente. SLM Solutions voit là une opportunité formidable de développer son activité en profitant du réseau de vente et de distribution de la multinationale japonaise.

« Avec l’acquisition de SLM Solutions, Nikon fait un pas important vers notre vision 2030. Nous nous concentrons sur la fabrication numérique comme moteur de croissance et nous allons créer de la valeur pour nos parties prenantes grâce au marché prometteur de la fabrication additive métal. » commente Toshikazu Umatate, le CEO de Nikon avant de conclure. « L’impression 3D va révolutionner la production de masse en permettant à nos clients de fabriquer des pièces très complexes, de réduire le temps de cycle, les émissions de carbone, les coûts énergétiques et les déchets. Nikon et SLM Solutions partagent la vision selon laquelle notre innovation axée sur la technologie va changer l’avenir de la fabrication. Cette acquisition sera la clé de la croissance de notre activité de fabrication numérique. »

Alexandre Moussion