Les nombreuses avancées qui ont pu être réalisées grâce à l’impression 3D en matière de médecine personnalisée, ne se cantonnent pas aux dispositifs médicaux comme les prothèses ou implants, ou plus récemment aux tissus biologiques. L’une des applications les plus prometteuses dans ce domaine concerne l’impression 3D de médicaments. De nombreux acteurs s’y intéressent pour créer des traitements plus faciles à administrer, mais surtout des dosages personnalisés qui soient mieux adaptés aux profils des patients.
Actuellement à un stade précoce de son développement, l’utilisation de la fabrication additive pour la fabrication de comprimés n’en reste pas moins une réalité. Après l’américain Aprecia, un précurseur dans ce domaine, ou plus récemment l’initiative de Vall d’Hebron, le service de pharmacie d’un hôpital universitaire de Barcelone, une start-up française a développé sa propre solution.
Dans un communiqué paru ce matin, MB-Therapeutics, une jeune pousse située à la faculté de pharmacie de Montpellier, a présenté un procédé unique en France dédié à la fabrication de médicaments personnalisés par impression 3D. Issue de huit années d’expérience et de recherches, cette solution dénommée Med-U Modular « 100% centrée sur le patient », s’adresse dans un premier temps aux enfants.
L’ambition portée par les fondateurs de l’entreprise, Stéphane Roulon et Ian Soulairol, est de faciliter la vie des jeunes patients en s’appuyant sur le haut degré de personnalisation qui caractérise l’impression 3D. Grâce cette technologie, elle est en mesure de créer des médicaments avec des dosages et des formes personnalisés qui sont mieux adaptés, tout en y associant plusieurs actifs au sein d’un même comprimé. De quoi mettre fin aux contraintes de la polymédication.
40% des parents commettent des erreurs de dosage lors de l’administration de médicaments à leurs enfants

Médicaments de différentes tailles et formes imprimés via la solution développée par MB-Therapeutics (crédits photos : MB-Therapeutics)
MB-Therapeutics explique en effet que les gélules et les comprimés actuels ne sont pas adaptés aux enfants en termes de taille et de quantité de principe actif. Un constat qui vient rejoindre celui de Multiply Labs, un fabricant spécialisé dans les filaments pharmaceutiques pour la fabrication de gélules en 3D : « Actuellement, les médicaments sont développés spécialement pour les hommes adultes blancs, ce qui signifie que toutes les femmes et tous les enfants ont une prescription excessive pour leur corps. » déclarait-il y a quelques années.
Pire encore, la start-up montpelliéraine ajoute que les suspensions liquides présentent un risque d’erreur d’administration. Ils seraient 40% des parents à commettre des erreurs de dosage lors de l’administration de médicaments à leurs enfants.
Quand bien même les pharmaciens préparent des médicaments aux dosages adaptés (38% des enfants reçoivent au moins un médicament préparé par un pharmacien. « Nous ne disposons pas
de procédé permettant de produire des formes orales solides personnalisées automatiquement » a déclaré le Dr Ian Soulairol, co-fondateur de la société et pharmacien hospitalier. »
Grâce à la solution additive développée par MB-Therapeutics, les pharmaciens seront donc en mesure de produire à la demande des médicaments à la fois dispersibles et mieux sécurisés, Plus facile à avaler, leur bon dosage empêchera toute erreur.
MB-Therapeutics n’hésite pas non plus à mettre en avant l’atout de souveraineté que représente sa solution, ainsi que le progrès sanitaire qu’elle engendrera grâce à la réduction du gaspillage de médicaments : « La solution peut pallier les ruptures de stocks en donnant la capacité aux pharmacies à usage intérieur et aux pharmacies officinales équipées d’un préparatoire de produire des médicaments avec une qualité industrielle, automatiquement. De plus, cette solution laisse place à un progrès sanitaire avec la réduction du gaspillage en médicaments, représentant 15 000 tonnes en France. »
« Ces systèmes garantissent une meilleure reproductibilité et une qualité constante des produits pharmaceutiques imprimés »

Stéphane Roulon et Ian Soulairol, les deux fondateurs de MB-Therapeutics (crédits photos : MB-Therapeutics)
Quant à savoir sur quel procédé et technologies s’appuie MB-Therapeutics, on se réjouit d’apprendre qu’il s’agit d’une solution française. La jeune pousse révèle avoir collaboré avec le fabricant Lynxter. Basée dans le Pays Basque, cette entreprise spécialisée dans les imprimantes 3D industrielles à extrusion, s’est notamment faite connaitre comme étant l’un des rares fabricants dans le monde à maîtriser l’impression 3D silicone.
L’autre singularité de ce fabricant, si vous le connaissez pas encore, est que là où habituellement une imprimante est attribuée à un seul type de matériau, sa technologie est capable de fonctionner avec des procédés très différents. Des têtes outils facilement interchangeables, lui permettent de traiter aussi bien des filaments (thermoplastiques), que des liquides (silicones), ou des pâtes (céramiques)…
Dans le cas présent, MB-Therapeutics tire avantage de la technologie de Lynxter qui est l’une des rares à pouvoir faire de l’impression 3D de gels (pharmaceutiques) par dosage volumétrique. La start-up explique que contrairement aux méthodes d’impression 3D pharmaceutiques par pression mécanique et air, où des forces mécaniques ou pneumatiques sont utilisées pour l’extrusion, le procédé de Lynxter repose sur une vis sans fin qui entraîne la matière jusqu’à la tête d’impression. Une approche qui permet d’éliminer les retards de débit et les variations dus au frottement.
« Les systèmes de dosage volumétrique permettent un réglage précis et indépendant du débit en fonction du matériau. Ces systèmes garantissent une meilleure reproductibilité et une qualité constante des produits pharmaceutiques imprimés. » ajoute MB-Therapeutics. « De plus, cette approche réduit la complexité et les coûts associés à l’intégration de composants mécaniques ou pneumatiques supplémentaires. Cependant, le volume mort dans le conduit peut générer une petite de matière » .
En attendant d’en savoir un peu plus sur la façon dont sera déployée sa solution d’impression 3D, MB-Therapeutics annonce que les premiers patients pourront bénéficier de ses médicaments personnalisés à l’horizon 2026. Jeunes papas, les deux fondateurs auraient particulièrement à coeur de soigner les enfants atteints de maladies cardiaques. Pour cela, la start-up travaille en étroite collaboration avec des professionnels de la santé, notamment le CHU de Nîmes.