Point de trêve estivale pour le marché de l’impression 3D. La valse des fusions-acquisitions se poursuit à un rythme soutenu. Une danse à laquelle les deux géants de l’impression 3D que sont les américains Stratasys et 3D Systems participent activement. Premier à dégainer, Stratasys a cette fois-ci jeté son dévolu sur un certain Covestro, un fournisseur de premier plan de polymères de qualité supérieure. Une prise de guerre bienvenue qui vise à élargir la gamme matériaux de ses technologies de stéréolithographie, DLP et de frittage de poudre. La société entend ainsi renforcer son catalogue en disposant de nouvelles matières qui soient innovantes, mais aussi axés sur la durabilité et l’économie circulaire.
Un nouveau cap dans son offre d’impression 3D, que son compatriote 3D Systems a également franchit à sa manière. Quelques mois après son retour remarqué sur le segment de l’extrusion (FFF) en raflant deux entreprises spécialisées, le pionnier de l’impression 3D SLA a cette fois-ci décidé d’accentuer ses efforts en direction de l’impression 3D de série. Une décision qui s’est concrétisée ce mois d’août par le rachat de dp polar.
Si vous ne connaissez pas ce fabricant allemand, il y deux ans celui-ci avait créé la surprise en dévoilant une imprimante 3D au fonctionnement très singulier : une machine à mouvement rotatif capable de produire des composants en continue et à grande vitesse. Un système surprenant dénommé AMpolar i2, qui repose en fait sur un technologie à jet de matière « HSR » « High Speed Rotative process » comparable à celle de son compatriote Stratasys (Polyjet).
La grande différence avec l’AMpolar i2, est qu’elle ne s’appuie pas sur un système à mouvement cartésien traditionnel XYZ comme c’est souvent le cas habituellement. À la place, cette imprimante utilise un grand disque à mouvement rotatif qui fait office de plate-forme de construction. Pendant que cette dernière tourne sur elle-même, une tête d’impression munie de plusieurs buses à jet d’encre haute résolution se déplace alors sur l’axe Z pour y déposer sélectivement la résine photopolymère. L’une après l’autre, les couches sont solidifiées par une source lumineuse.
Là où habituellement chez les imprimantes 3D traditionnelles cartésiennes, c’est la tête d’impression qui se déplace séquentiellement durant tout le processus de fabrication, celle de l’AMpolar i2 reste immobile au-dessus de la plateforme rotative. Une approche très différente qui permet d’obtenir une impression 3D en continu, sans arrêt et redémarrage.
L’autre avantage non négligeable de cette technique, est qu’elle permet de réduire l’usure et les vibrations habituellement associées aux systèmes à mouvement cartésien. Cerise sur le gâteau, 3D Systems ajoute que son système peut intégrer des éléments de prétraitement, de production et de post-traitement, avec en plus la possibilité de se connecter à un logiciel de planification des ressources d’entreprise. Un atout supplémentaire pour convaincre des secteurs tels que l’aérospatiale, la santé et d’autres marchés hautement réglementés, où la traçabilité et l’assurance qualité sont très présentes.
« dp polar a conçu un système totalement unique qui permet une véritable production de masse… »
L’architecture particulière de l’AMpolar i2 à un autre avantage, celui de faciliter l’ajout d’équipements extérieurs pour automatiser certaines tâches. Ce qui suggère par exemple, que des pinces montées sur bras robotiques pourraient ainsi être employées pour retirer les pièces une fois l’impression terminée, et/ou remplacer le plateau d’impression. Nous fournissant quelques indices sur les ambitions de 3D Systems dans le domaine de l’électronique, la société évoque également la possibilité d’utiliser des systèmes robotiques pour positionner des composants électroniques ou d’autres éléments dans le corps de la pièce au fur et à mesure de son impression.
Avec cette nouvelle acquisition 3D Systems entend exploiter son vaste portefeuille de matériaux sur la AMpolar i2. D’autant que la technologie de dp polar présente un autre avantage de taille. Celui de permettre des impressions multi-couleurs et matériaux. Les têtes d’impression de l’AMpolar ont en effet cette capacité de combiner une variété de caractéristiques physiques, comme l’élasticité, la dureté, la résistance à la température, ou la couleur. Les clients actuels et nouveaux de 3D Systems pourront ainsi tirer parti de résines que le fabricant allemand s’est employé à développer avec un chimiste du nom de Altana. Une collaboration qui a abouti à trois matériaux : une résine polyvalente visant le prototypage et des pièces fonctionnelles à contraintes modérées, un matériau flexible pour les applications nécessitant un étirement ou une compression, et enfin un autre pour les supports solubles de haute résolution pour les formes complexes. Un partenariat fructueux donc, dont il serait étonnant qu’il ne se poursuive pas avec 3D Systems…
« Cette acquisition est la prochaine étape dans l’exécution de notre stratégie d’investissement visant à fournir à nos clients un portefeuille de solutions de fabrication additive de pointe pour relever les défis de leurs applications critiques. » Conclut Jeffrey Graves, président et CEO de 3D Systems. « dp polar a conçu un système totalement unique qui permet une véritable production de masse. La capacité d’imprimer une large gamme de matériaux, ainsi que la conception modulaire de l’imprimante qui permet de réaliser plusieurs processus sur une seule plateforme à grande vitesse, permettent non seulement d’augmenter la productivité de plusieurs ordres de grandeur, mais aussi de réduire le coût total de possession. La clôture de la transaction est prévue pour le quatrième trimestre de 2022. »
Le rendement et la réduction significative des coûts par pièce offerte par ce système, promettent d’ouvrir à 3D Systems les portes d’un certain nombre de secteurs et d’applications qui lui étaient jusqu’ici difficilement accessibles. La solution trouvée par le fabricant américain pour atteindre un débit plus élevé, consistait jusqu’à présent à automatiser sa technologie SLA via des systèmes à bras robotiques. Une approche qui avait donné naissance à sa plateforme de production Figure 4. La combinaison de l’AMpolar i2 et du logiciel de pilotage Oqton (dont 3D Systems a fait l’acquisition l’an passé), pourrait bien être la clef d’une véritable fabrication de masse.
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