Voxel8 fait partie de ces rares fabricants dans le monde à maîtriser l’impression 3D électronique. Fondée en 2013 par le Dr Jennifer Lewis Havard, professeur à l’Université d’Havard, cette start-up américaine est connue pour son imprimante 3D éponyme capable d’imprimer des circuits électroniques. Elle repose sur un système de type FDM (dépôt de matière fondue) qui permet l’impression d’un substrat avec un filament plastique sur lequel sont ensuite déposées des encres conductrices avec une seconde buse pour tracer le circuit. Silencieuse depuis un moment, la start-up a récemment refait surface avec un nouveau système spécialement conçu pour les chaussures.
Il faut dire que depuis quelques années, l’impression 3D monte en puissance dans le secteur du sportwear. De New Balance à Adidas, les plus grandes marques de sport expérimentent cette technologie pour produire des semelles intercalaires personnalisées et plus performantes. Plusieurs start-up innovantes parmi lesquelles Eden 3D ou ScientiFeet, se sont également lancées sur le créneau des semelles intérieures.
Les rares entreprises à s’être essayées à l’impression 3D d’empeignes ont rapidement disparu de la circulation. Cette partie de la chaussure où se concentrent une bonne partie de l’esthétisme et du confort, est un défi qu’aucun fabricant n’est vraiment parvenu à relever. Habituellement ce type de pièce est fabriqué selon des techniques traditionnelles qui nécessitent beaucoup de main-d’œuvre et de matériaux, comme la découpe, l’outillage, la couture, la finition, le collage et l’assemblage des composants.
Jusqu’à 350 000 paires de chaussures par an et par système
Grâce au soutien de deux fonds d’investissement – DSM Venturing et Ventures HP – Voxel8 a développé une méthode qui permettrait d’automatiser et rationaliser la fabrication d’empeignes par impression 3D. Pour se faire, la start-up a développé deux systèmes : Active Lab pour le développement de produits, les tests d’usure et la production limitée de chaussures de sport, et ActivePro, qui permettrait d’atteindre des niveaux de production à grand échelle, soit jusqu’à 350 000 paires de chaussures par an et par système.
« Si vous preniez un morceau de textile et que vous le coudiez en forme de chaussure, vous n’auriez pas assez de structure pour que la chaussure soit vraiment bien droite et belle et que votre pied reste centré sur les éléments amortisseurs de la chaussure.
Vous n’auriez ni logos, ni texte, ni image de marque », a déclaré le PDG et co-fondateur de Voxel8, Travis Busbee. « En fin de compte, ce qui se trouve au-dessus de ce textile crée la structure qui donne à la chaussure ses performances fonctionnelles et crée également le langage et le style du design ou du moins y joue un rôle énorme. »
Une tête à jet d’encre permettant de teindre le polyuréthane et le tissu
Voxel8 a étendu sa technologie à la chaussure en élaborant un système baptisé ActiveMix® capable de pulvériser ou d’extruder des élastomères de polyuréthane liquide sur un textile. Une fois l’impression terminée, le matériau photosensible est solidifié à l’aide d’une lumière UV. L’autre particularité de cette technologie réside dans sa tête d’impression qui permet de régler la composition des élastomères à la volée. De cette manière le système peut modifier les propriétés des matériaux sur une une partie bien précise de la chaussure, la rendant souple et extensible à certains endroits et plus rigide à d’autres.
Enfin pour la coloration, un autre processus appelé « ActiveImage », utilise une tête à jet d’encre semblable à celle d’une imprimante 2D traditionnelle, qui permet de teindre le polyuréthane et le tissu. Avec ses technologies d’impression ActiveMix® et ActiveImage®, Voxel8 est en mesure de proposer aux fabricants de chaussures une gamme extrêmement étendue de propriétés de matériaux en couleur, au sein d’une seule et même impression, sans jamais modifier les matières premières de base.
« Nous mettons essentiellement un pigment dans ce polyuréthane en utilisant un procédé à jet d’encre », indique Travis Busbee. « Cela nous donne un contrôle de la qualité photo de la couleur à l’intérieur des structures de propriétés matérielles réglables numériquement. » Le fondateur de Voxel8 poursuit en expliquant qu’il faut habituellement entre 12 et 18 mois entre le moment où une chaussure est conçue et le moment où elle arrive sur les étagères. Grâce à sa solution additive, le délai de mise sur le marché d’une paire de baskets pourrait être réduit à seulement quelques semaines. Les nouvelles technologies ActiveMix® et ActiveImage®, ont été intégrées à un système de fabrication numérique dénommé ActiveLab® qui est d’ores et déjà vendu à partir de $250 000. Ce prix comprend le matériel, les logiciels et les formulations de matériaux propriétaires.
Initialement conçu pour la conception, le prototypage et la production d’empeignes de chaussures et vêtements de sport, le système pourrait être utilisé dans d’autres domaines comme des dispositifs médicaux ou des produits de consommation plus larges. De nouvelles formulations de matériaux comme les silicones et les époxydes, seront ajoutées à mesure que Voxel8 abordera les nouveaux marchés qui en ont besoin. Il faudra attendre d’ici fin 2020 avant la mise sur le marché du système ActivePro qui permettra une production en série de 350 000 paires de chaussures par an.