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Supernova (BCN3D) : un contrat de 2 millions $ dévoile sa capacité à imprimer des matériaux énergétiques de qualité militaire

résine VLM

L’American Center for Manufacturing & Innovation (ACMI), une organisation américaine dédiée à promouvoir l’excellence et l’innovation dans les secteurs de la fabrication et des technologies avancées, en offrant des ressources, des formations et un soutien aux entreprises et industriels, vient d’officialiser la signature d’un contrat de 2 millions de dollars avec un acteur montant de la fabrication additive.

Ce partenaire n’est autre que Supernova, une spin-off du fabricant d’imprimantes 3D espagnol BCN3D, spécialisée dans l’impression 3D résine industrielle.

On apprend que le contrat a été conclu dans le cadre du programme pilote sur les produits chimiques critiques de l’ACMI, par le biais du contrat à attribution multiple (MAC) du Department of Defense Information Analysis Center (DOD IAC) pour soutenir le portefeuille de projets d’expansion des capacités de fabrication et de priorisation des investissements (MCEIP) de la politique industrielle du Ministère de la Défense des États-Unis (DOD).

Pour ceux qui découvriraient BNC3D, rappelons que ce fabricant barcelonais s’est construit une solide réputation sur le segment des imprimantes 3D FFF (extrusion de filament) industrielles. Dans une logique de diversification, en mars 2023, l’entreprise avait opéré un tournant en lançant sa propre technologie d’impression 3D résine.

Baptisée VLM, l’atout principal de cette imprimante 3D résine par rapport aux solutions existantes, est qu’elle est capable de traiter très rapidement des résines à haute viscosité, soit jusqu’à 50 fois plus que l’existant, compatibles avec les besoins de performances mécaniques et de productivité des entreprises.

Basée à Austin et Barcelone, sa filiale Supernova Industries Corp, vise à se concentrer sur le développement de nouveaux matériaux pour débloquer de nouvelles applications, notamment dans les secteurs de l’automobile, l’aérospatiale, l’industrie manufacturière, les biens de consommation, la chaussure, l’audiologie et la santé.

Ce qui fait de la technologie VLM un procédé game changer, c’est qu’elle capable de traiter des matériaux très visqueux, qui lui permettent d’imprimer des matériaux très spécifiques, notamment des propriétés dites énergétiques. Les matériaux compatibles avec la technologie VLM couvrent une large gamme de propriétés, incluant des analogues pour des composites rigides, ductiles, ainsi que des caoutchoucs et silicones. A cela s’ajoute des variantes ESD (anti-décharge électrostatique) et résistants au feu.

En novembre dernier, Supernova avait officialisé un nouveau système industriel dédié à sa technologie VLM. Appelé « Pulse Production Platform », cette solution de bout en bout pouvant fonctionner 24h/24 et 7j/7, dispose d’un volume de fabrication de 340 x 200 x 300 mm et imprimer jusqu’à 5 kg de matériaux par heure. Tout laisse donc à penser que c’est cette technologie qui sera exploitée pour la commande d’ACMI.

Si vous ne le savez pas, les matériaux énergétiques sont des substances chimiques capables de libérer une grande quantité d’énergie sous forme de chaleur, de gaz ou de pression lorsqu’ils subissent une réaction, et sont couramment utilisés dans les explosifs, les propulseurs et les pyrotechniques.

Un exemple concret de matériau énergétique est la poudre noire utilisée dans les feux d’artifice, qui libère une explosion rapide d’énergie pour propulser et colorer les éclats lumineux dans le ciel. De même, le carburant solide des moteurs-fusées, comme le perchlorate d’ammonium, libère une immense quantité de gaz et de chaleur pour générer la poussée nécessaire au décollage des fusées.

Supernova, plus exactement sa branche « Defense & Space » dédiée à l’industrie spatiale et de la défense, tirera parti de sa technologie VLM pour imprimer des composants de qualité militaire tels que des propulseurs composite en perchlorate d’ammonium (APCP) et cyclotriméthylène trinitramine (RDX), habituellement incompatibles avec les procédés de fabrication additive.

Il faut savoir que L’APCP est couramment employé dans les moteurs-fusées à poudre (SRM), tandis que le RDX constitue l’élément explosif du C4.

« En étant les pionniers de l’impression 3D de matériaux énergétiques, nous ne faisons pas que faire progresser la technologie »

Supernova explique que les matériaux énergétiques sont essentiels au bon fonctionnement des systèmes de défense, mais que les techniques de traitement traditionnelles limitent leur potentiel. Sa technologie apportera des innovations clés essentielles pour améliorer la sécurité, assurer la cohérence des matériaux, réduire le flux de déchets et débloquer de nouvelles capacités de performance, en particulier dans des applications telles que les moteurs-fusées à poudre, les bombes, les fusées éclairantes ou le poids des balles.

Fondateur et PDG de la société, Roger Antunez a déclaré : « Supernova Defense & Space représente notre engagement à repousser les limites de ce qu’il est possible de fabriquer. En étant les pionniers de l’impression 3D de matériaux énergétiques, nous ne faisons pas que faire progresser la technologie : nous fournissons aux ingénieurs les outils nécessaires pour innover et remodeler l’avenir des industries de la défense et de l’espace. »

Ce nouvel exemple d’application confirme en tout cas la dynamique importante de la fabrication additive dans le secteur de la défense. L’autre tendance positive qu’il souligne, est que dans un contexte de marché particulièrement tendu, l’impression 3D voit émerger des entreprises plus solides, portées par des ambitions plus réalistes visant à mettre le bon couple procédé/matériau en face de la bonne application, dans des secteurs à haute valeur ajoutée tels que l’aérospatiale et de la défense.

Dans un contexte géopolitique marqué par des tensions et l’urgence de la relance du réarmement, l’impression 3D apparaît sans nulle doute comme l’une des solutions clefs à même de répondre à la fois aux besoins d’innovation et de souveraineté. Aussi bienvenue soit- elle, l’arrivée rapide de nouveaux matériaux très spécifiques tels que celui de Supernova, soulève plusieurs défis liés notamment aux impératifs réglementaires et de qualification.

Alexandre Moussion