Accueil » Automobile » Divergent : le « game changer » de l’impression 3D automobile passe à la vitesse supérieure

Divergent : le « game changer » de l’impression 3D automobile passe à la vitesse supérieure

Hypercar Czinger 21 C développée par Divergent

Hypercar Czinger 21 C développée par Divergent (crédits photo : Czinger)

Si les grands noms de l’automobile, à l’image de Ford ou Škoda, ont déjà tous intégré l’impression 3D sous une forme ou une autre, pour l’heure, cette technologie se montre surtout utile en tant que support à la production. La promesse d’une technologie qui révolutionnerait ce secteur par sa présence sur les chaînes des constructeurs automobile pour faire de la fabrication en série, se heurte encore à quelques obstacles.

La bonne nouvelle pourrait néanmoins venir d’un acteur innovant du nom de Divergent. Start-up américaine basée à Los Angeles, celle-ci a fait cette semaine son retour sur le devant scène en annonçant un nouveau financement de pas moins de 160 millions de dollars. Les plus connaisseurs se souviennent peut-être que cette entreprise avait défrayé l’actualité en 2016 en annonçant un partenariat ambitieux avec PSA. Un accord qui visait à intégrer des imprimantes 3D sur la chaîne de production dans le but de produire des voitures quasi entières à partir de structures métalliques imprimées en 3D. « Nous disposons du potentiel pour optimiser notre empreinte industrielle, réduire le poids total du véhicule ainsi que la complexité de fabrication tout en nous permettant une flexibilité quasi infinie en termes de conception. Il s’agit d’une transformation radicale pour notre activité. » s’était alors enthousiasmé le PDG de PSA (devenu Stellantis).

À l’origine, la solution numérique de bout en bout développée par Divergent, appelée DAPS (pour Divergent Adaptive Production System), visait à fabriquer des châssis métalliques allégés grâce à l’utilisation de tubes de carbone reliés entre eux par le biais de fixations imprimées en 3D (voir vidéo ci-dessous). La premier prototype née de cette solution est la fameuse Blade, une supercar très médiatisée l’année de sa présentation en 2015. La technologie et l’entreprise ayant beaucoup mûri depuis, le système de Divergent a évolué vers quelque chose de plus ambitieux encore, qui permettrait aujourd’hui de concevoir et de fabriquer des automobiles presque entièrement.

« L’achat de la SLM NXG XII 600 est l’aboutissement d’années de développement conjoint intensif »


L’entreprise semble aujourd’hui toucher du doigt son objectif, à savoir remplacer le processus traditionnel de conception et de production des structures automobiles, par un système propriétaire breveté de bout en bout. Protégée par pas moins de 500 brevets, sa solution logiciel-matériel « DAPS » repose non seulement sur un logiciel et un système d’assemblage automatisé propriétaires, mais aussi des matériaux, y compris les alliages et des polymères. Le seul élément développé avec un partenaire extérieur est le système d’impression 3D.

Pour cela, Divergent a choisi de se tourner vers le spécialiste allemand de la fabrication additive métallique SLM Solution. Une collaboration qui a donné naissance à l’un des systèmes de fabrication additive métallique les plus impressionnants et novateurs de ces dernières années : la NXG XII 600. Armé d’un volume de construction de 600 x 600 x 600 mm, ce mastodonte, outre ses nombreuses fonctionnalités innovantes, se distingue par la présence douze lasers de 1 KW capables de fonctionner simultanément. Une capacité inédite, qui à titre de comparaison, lui permet d’être 20 fois plus rapide qu’un système à laser unique telle que la SLM 280. SLM Solutions affirme qu’au maximum de ses capacités (1000 cm3 / h), sa plateforme serait capable de produire plus de 10 000 kg de pièces par an.

Séduit par les performances de ce bijou de technologie spécialement conçu pour être utilisé dans la production en série ainsi que pour l’impression de grandes pièces, Divergent a fait l’acquisition de 6 systèmes. « L’achat de la SLM NXG XII 600 est l’aboutissement d’années de développement conjoint intensif qui achève le passage du prototypage à la production de structures complexes, lorsqu’il est combiné avec le système DAPS comme l’avenir de la conception de l’IA humaine et des systèmes durables, » avait déclaré Kevin Czinger, fondateur et PDG de Divergent et membre du conseil de surveillance de SLM Solutions. « Évidemment, cette imprimante fonctionne lorsque vous avez tous les composants de notre système, qui incluent notre assemblage automatisé et la façon dont nous générons la conception et les matériaux que nous avons inventés. Nous l’utilisons depuis près de deux ans et nous sommes l’utilisateur bêta de ce qui a été conçu pour faire partie du DAPS. »

« le DAPS est une fabrication qui sauve la planète en ce sens qu’il réduit radicalement l’impact environnemental »

Système NXG XII 600 acquis par Divergent, développé avec SLM Solutions

Système NXG XII 600 acquis par Divergent, développé avec SLM Solutions (crédits photo : SLM Solutions)

La démonstration la plus récente du système DAPS se nomme la Czinger 21 C. Une hypercar de 1 250 chevaux fabriquée par Divergent, qui comporte plusieurs pièces imprimées en 3D, dont le châssis, des composants de moteur, un système d’échappement à partir d’Inconel, des montants de pare-brise en titane, ainsi que d’autres pièces imprimées en alliage d’aluminium.

En septembre 2021, le pilote de course Joel Miller avait réalisé avec cette voiture un temps record de 2 minutes 11,33 secondes sur le Circuit des Amériques, soit cinq secondes plus rapide que le record précédent établi par la Laguna Seca. Cerise sur le gâteau, le V8 bi-turbo de 2,88 litres de la Czinger a été conçue de manière à pouvoir fonctionner avec toute une gamme de carburants, y compris le méthanol issu de recyclage de carbone, et d’autres carburants à faibles émissions, de sorte qu’elle peut être utilisée comme un « véhicule à émissions nulles », revendique Divergent.

À l’instar d’autres constructeurs automobile, Divergent explique qu’avant de confronter sa solution aux véhicules grand public, se concentrer d’abord sur les voitures de sport et de luxe, est une stratégie plus logique sur le plan économique et la performance. Une ambition dont on apprend qu’elle serait sur de bons rails, la société ayant révélé que son système DAPS étaient d’ores et déjà utilisé par huit marques automobiles, dont six principaux groupes OEM mondiaux qu’elle prévoit d’annoncer en fin d’année. L’utilisation de la fabrication additive porterait avant tout sur l’allègement des véhicules, les pièces à forte valeur ajoutée et à performance.

En attendant de voir l’aboutissement de ces collaborations palpitantes, Kevin Czinger ne cache pas son ambition de rivaliser avec des marques iconiques de l’automobile de luxe, telles que Bugatti et McLaren avec sa Czinger 21 C. Les passionnés de supercar n’auront plus à attendre encore très longtemps, les premiers exemplaires étant prévus pour la fin de l’année 2023. Au total, ce sont 80 unités qui seront vendues par des concessionnaires de voitures de luxe traditionnels, notamment O’Gara Coach en Californie du Sud, Prestige Imports à Miami Beach et Pfaff Auto au Canada.

« une confirmation éclatante de notre caractère perturbateur dans l’industrie de la construction automobile »

Châssis et différents éléments de la structure automobile conçu et imprimé grâce à la solution ADPS de Divergent

Châssis et différents éléments de la structure automobile conçue et imprimée grâce à la solution DAPS de Divergent (crédits : Czinger)

Implantée dans le sud de la Californie, Divergent est une entreprise qui compte 180 employés parmi lesquels des ingénieurs et scientifiques ayant travaillé pour les plus grandes marques, dont Ferrari, Pagani, Boeing et Apple, mais aussi des équipes de Formule 1. Derrière le design de la Czinger se cache également un certain Dave O’Connell, qui a passé 25 ans chez Mitsubishi Motors.

Les 160 millions de dollars récoltés pour industrialiser la plateforme de Divergent, s’accompagnent également de l’arrivée de John L Thornton, ancien président de Goldman Sachs, président exécutif de Barrick Gold et membre du conseil d’administration de Ford Motor Company, au sein de son conseil d’administration.

« Ce financement représente une confirmation éclatante de notre caractère perturbateur dans l’industrie de la construction automobile, qui n’a vraiment pas connu une telle révolution depuis que Henry Ford a mis au point la chaîne de montage, il y a plus de 100 ans » , a déclaré le fondateur et CEO de Divergent, Kevin Czinger. « D’une grande importance, étant donné l’accent mis sur la durabilité au niveau mondial, le DAPS est une fabrication qui sauve la planète en ce sens qu’il réduit radicalement l’impact environnemental du cycle de vie en optimisant l’efficacité totale du véhicule « du berceau au berceau. »

Alexandre Moussion