Si le monde de la bijouterie tire encore largement parti de la fabrication additive de manière indirecte – le plus souvent pour faire du prototypage ou du moulage à cire perdue – l’impression directe de pièces métalliques progresse dans ses pratiques. Les nombreuses avancées réalisées par les constructeurs d’imprimantes métal, tant en termes de coût que de performance, convainquent de plus en plus d’acteurs du luxe à mieux considérer cette option. La dernière machine additive dont s’est récemment dotée EAC, fabricant français spécialisé dans les ornements et pièces métalliques de luxe, illustre bien cette évolution.
L’exemple le plus récent nous vient de Suisse. On apprend que Kif Parechoc, expert en composants des mouvements horlogers, vient de conclure un partenariat très innovant avec le spécialiste français de l’impression 3D métallique industrielle AddUp, pour utiliser sa technologie à des fins horlogères de très haute précision. Fleuron réputé pour la qualité de ses systèmes anti-chocs, de la raquetterie et des barillets, utilisés par les plus grands noms de l’industrie horlogère suisse et européenne, la filiale du groupe Acrotec indique que le premier projet portera sur un fermoir de montre.
« Pour ce projet, nous sommes partis d’un produit classique mais nous y avons intégré des aspects inédits, telles que des structures lattices, des formes organiques ou encore des marquages en creux. » Explique Yoann Canon, directeur industriel de Kif Parechoc. « A présent, nous travaillons sur le développement de nouveaux procédés de post-traitement, adaptés aux exigences du marché. L’intérêt de la collaboration avec AddUp est une évidence technologique si l’on combine leur maîtrise de l’impression 3D et notre connaissance des produits, de leur industrialisation et des opérations de finition. »
Le choix du matériau pour imprimer la pièce en question se serait quant à lui porté sur une poudre d’acier inoxydable 316L à faible teneur en carbone. Un métal apprend-t-on, couramment utilisé dans le domaine de l’habillage des montres pour ses bonnes propriétés mécaniques ainsi que sa grande résistance à la corrosion, « deux éléments essentiels dans la réalisation d’une montre, » commente le Docteur Maria Averyanova, en charge du développement du marché du luxe chez AddUp. « D’un point de vue esthétique, l’acier 316L ne perd pas son éclat et ne ternit pas au fil du temps, et il a comme autre avantage de pouvoir être entièrement recyclé. »
« ouvrir la voie de nouvelles applications de la fabrication additive métallique, dans l’industrie horlogère… »
Outre les nombreux avantages de la fabrication additive comparés à l’usinage, tels que les économies de matière première, la complexité géométrique, ou encore amélioration des performances des pièces (meilleurs échanges thermiques, par exemple), Kif Parechoc justifie le choix de son partenaire français par la capacité de ses machines à fusion laser sur lit de poudre (L-PBF, pour Laser Powder Bed Fusion) à utiliser des poudres métalliques de fine granulométrie, la FormUp 350 nouvelle génération.
Des poudres fines qui permettent à la fois de réaliser des pièces complexes sans supports (ces structures qui maintiennent les pièces pendant l’impression, mais qui doivent être usinées après la fabrication), et d’obtenir des pièces précises aux états de surfaces moins rugueux qu’avec la plupart des machines du marché. Fort de son savoir faire en traitements de surface, Kif Parechoc estime que ces caractéristiques vont donner naissance à des pièces et des mécanismes totalement nouveaux dans le monde de l’horlogerie.
« Même si l’impression 3D métallique s’est fortement développée ces dernières années, elle reste le plus souvent utilisée pour la fabrication de pièces mécaniques « classiques ». Les industriels de la micromécanique s’y intéressent peu, ou pas, pour les raisons de précision et d’états de surfaces évoqués plus haut. » Conclut AddUp. « Mais grâce aux innovations proposées par AddUp et Kif Parechoc, tant sur l’optimisation du procédé que sur les opérations de post-traitement des pièces, ce partenariat pourrait ouvrir la voie de nouvelles applications de la fabrication additive métallique, dans l’industrie horlogère et plus généralement dans toute l’industrie de la microtechnique et de la micromécanique. »
AddUp qui n’en est pas à sa première collaboration du genre, avait réalisé il y a deux ans un démonstrateur de savoir-faire avec Decayeux STI. Sa technologie avait alors servi à la réalisation d’un magnifique écrin qui renfermait une collection de 10 pièces de luxe métalliques, dont des boucles de ceinture et des fermoirs.