Aucun domaine ne semble décidément échapper à l’impression 3D, y compris les plus insolites. Dernièrement, c’est un groupe de chercheurs de l’Université des sciences et technologies de Huazhong à Wuhan, en Chine, qui est parvenu à développer un matériau d’impression 3D très glissant permettant la fabrication de toilettes autonettoyantes.
Bien que pouvant prêter à sourire, cette innovation pourrait néanmoins permettre de résoudre les problèmes de sanitaires insalubres (à fortiori dans les lieux publics), mais surtout de faire des économies considérables en termes de consommation d’eau. En effet, en raison des adhérences inévitables entre les excréments et autres déjections humaines et les surfaces des toilettes, des quantités très importantes d’eau sont ainsi gaspillées pour les éliminer.
Il faut savoir que dans un pays comme la France, par exemple, environ 20% de notre consommation d’eau provient des toilettes, soit plus de 11.000 litres consommés par personne/an pour sa chasse d’eau… À l’échelle du territoire, cela représente 100 milliards de litres d’eau qui partent dans les égouts chaque année.
Le professeur Yike Li, l’un de ces chercheurs à l’origine de ces travaux, explique que s’il existe des surfaces glissantes pouvant repousser des fluides complexes et divers solides viscoélastiques, elles résistent difficilement aux abrasions mécaniques. En utilisant l’impression 3D, lui et son équipe seraient parvenus à réaliser une cuvette super glissante résistante à l’abrasion (ARSFT).
La stratégie des protagonistes a consisté à s’appuyer sur un système d’impression 3D par frittage laser, ce qui leur a permis d’obtenir à la fois une forme complexe autoportante en 3D, mais aussi une structure poreuse capable d’accueillir une quantité considérable de lubrifiants pour une propriété super glissante résistante à l’abrasion.
« Le volume de rinçage réduit entraînerait moins de gaspillage d’eau pendant le transport vers les installations de traitement »
Les scientifiques expliquent avoir conçu un modèle de toilettes, environ 10 fois plus petit qu’une version grandeur nature, lequel a été imprimé à l’aide d’une poudre de plastique hydrophobe. Ils ont ensuite lubrifié la surface avec une sorte d’huile de silicone, qui pénètre également sous la surface en raison de la structure poreuse des toilettes.
En testant divers substances mimant divers sécrétions humaines, comme de l’eau boueuse, du lait, du yaourt, du miel, du gel rempli d’amidon et des excréments synthétiques, le groupe de chercheurs a constaté qu’aucun d’entre eux n’y restait coincé. Plus encore, après les avoir frottées avec du papier de verre plus de 1 000 fois, les toilettes étaient toujours aussi glissante.
Yike Li estime que ce genre d’innovation serait particulièrement utile dans les toilettes très fréquentées, c’est à dire dans les lieux publiques tels que celles équipant par exemple les autoroutes. « Le volume de rinçage réduit entraînerait moins de gaspillage d’eau pendant le transport vers les installations de traitement, réduisant ainsi les coûts de transport« , commente Li avant de conclure : « Mais il faut d’abord adapter le procédé aux toilettes de grande taille et le rendre moins cher. »
Bien sûr, cette avancée pourrait trouver des applications diverses qui pourraient s’étendre bien au-delà des toilettes. Potentiellement, elle pourrait être la solution aux défis liés à l’accumulation, à la résistance et au nettoyage dans des secteurs très variés. Je pense notamment à l’industrie agroalimentaire, où les équipements de transformation alimentaire peuvent parfois être difficiles à nettoyer en raison de résidus collants. Un revêtement hyperglissant pourrait faciliter le nettoyage des équipements de transformation alimentaire, réduisant ainsi le temps nécessaire pour le nettoyage et améliorant l’efficacité des opérations. Les dispositifs médicaux sont un autre domaine qui pourrait bénéficier de ce type de solution, notamment les cathéters qui peuvent être sujets à l’accumulation de dépôts biologiques. Un revêtement perméable et hyperglissant pourrait réduire ces accumulations, facilitant ainsi l’utilisation et le nettoyage de ces dispositifs.
Dans le secteur naval et maritime, cela pourrait solutionner les problèmes de biofouling, c’est à dire l’encrassement biologique créé par l’accumulation indésirable d’organismes aquatiques tels que des micro-organismes, des plantes ou des animaux sur les surfaces immergées ou exposées à un environnement aquatique.