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Poietis étend sa technologie de bioimpression aux patchs cardiaques

Poietis étend technologie de bioimpression aux patchs cardiaques

(crédits photo Poietis)

En attendant ce jour encore lointain où la bioimpression pourrait nous permettre de reproduire des organes à la demande pour pallier au manque de donneurs, des avancées toutes aussi passionnantes se dessinent. Les résultats enregistrés ici et là par les chercheurs nous montrent qu’à court terme cette technologie a le potentiel de révolutionner la production de tissus biologiques « plus simples » comme la peau et le cartilage. Le récent exploit de 3DBio Therapeutics, une société de biotechnologie américaine qui est parvenue à reproduire une oreille pour une patiente atteinte de microtie, souligne les avancées déjà visibles de la bioimpression. Ce que l’on sait moins c’est que cette technologie pourrait également nous être d’une aide très précieuse pour optimiser les soins d’organes très complexes comme le coeur.

Proche de rendre sa technologie de bioimpression accessible aux patients pour de grandes greffes de peau, la start-up française Poietis nourrit d’autres ambitions pour sa technologie. Le dernier défi de la jeune pousse bordelaise porte sur une collaboration avec l’éminent Professeur Philippe Menasché. Objectif : créer un patch bioimprimé pour traiter l’insuffisance cardiaque.

Ce chirurgien cardiaque si vous le connaissez pas, est un pionnier de la thérapie cellulaire. Mobilisé depuis une vingtaine d’années pour soigner l’insuffisance cardiaque, celui-ci a réussi la prouesse de concevoir et réaliser les premières greffes de cellules souches musculaires chez l’homme. C’était il y a 22 ans déjà. L’autre grande avancée de ce médecin, est un pansement cellulaire à partir de cellules souches embryonnaires dont il a réalisé le premier essai clinique en janvier 2015. Une première mondiale.

Bien que prometteuse, cette technique doit encore lever un certain nombre de barrières pour arriver à la restauration d’un myocarde défaillant. C’est là que la bioimpression entre en jeu. Sa faculté à organiser avec précision diverses structures cellulaires en 3D, pourrait être la clef pour optimiser un nouveau type de thérapie reposant sur ce qu’on appelle les « vésicules extracellulaires » (VE).

Révélées il y a quelques années, ces nanoparticules qui sont sécrétées par des cellules de différents tissus ou organes, jouent un rôle clé dans le transport du matériel biologique entre cellules/tissus. Des études ont même montré que les vésicules libérées par certaines cellules immunitaires, les lymphocytes T, amélioraient la fonction des vaisseaux sanguins et protégeaient le cœur lors d’un infarctus du myocarde. C’est pourquoi les VE constituent un approche thérapeutique innovante. Pouvoir tirer parti de leur capacité de renouvellement cellulaire pour les cellules cardiaques contractiles, permettrait donc une meilleure cicatrisation du coeur. Un motif d’espoir pour les 80 000 personnes qui chaque année en France sont victimes d’un infarctus du myocarde.

Le co-fondateur de Poietis Bruno Bruisson, m’explique : « Le mécanisme d’action des cellules souches est essentiellement paracrine et implique notamment la libération de vésicules extra-cellulaires qui, en transférant leur contenu dans les cellules cibles, peuvent activer des voies de signalisation cardio-protectrices. Ce projet vise à bio-imprimer ces vésicules dans un gel biocompatible afin d’induire une distribution spatiale homogène permettant d’optimiser leur libération dans le myocarde. Nous devrions mener, au moins dans la première partie du projet, en parallèle le développement et l’évaluation d’un patch bioimprimé fonctionnalisé soit par des cellules souches mésenchymateuses différenciées à partir d’iPSC soit par des vésicules endocrines produites par ces cellules. »

« Cela matérialise la versatilité de notre plateforme de bio-impression et l’extension de son portefeuille d’applications »

Plateforme de Bio-impression NGB

Plateforme de Bio-impression NGB (crédits photo Poietis)

Succédant à une première phase de preuves de concept, cette collaboration entre Poietis et le Centre de recherche cardiovasculaire PARCC – Inserm – Université Paris Cité – UMR 970 et Service de Chirurgie Cardio-vasculaire, hôpital Européen Georges Pompidou, vise dans un premier temps à mettre en place un modèle animal et à évaluer l’efficacité d’un biomatériau bio-imprimé sur un modèle d’insuffisance cardiaque in vivo. Les premiers essais cliniques pourraient avoir lieu d’ici trois à quatre ans.

Poietis précise que si l’indication clinique retenue en priorité est le traitement de l’insuffisance cardiaque, la mise en évidence du rôle bénéfique du patch co-développé (en vue d’une thérapie cellulaire et/ou acellulaire) pourrait concerner d’autres secteurs de la médecine régénérative, notamment ceux de la cicatrisation cutanée, des maladies oculaires et de certaines pathologies intestinales inflammatoires.

« L’insuffisance cardiaque est souvent la conséquence ultime de différentes maladies cardiovasculaires. » commente Le Professeur Menasché. « La combinaison de la maîtrise technologique de Poietis en bioimpression avec notre expertise dans les thérapies par cellules souches, ou les facteurs bioactifs qu’elles produisent, pourrait déboucher relativement vite sur une nouvelle stratégie thérapeutique. »

Bruno Brisson, Directeur Business Développement de Poietis, ajoute « Nous sommes très heureux de la mise en place de cette nouvelle collaboration en recherche translationnelle avec une équipe leader au niveau international en chirurgie cardiaque, et pionnière de la thérapie cellulaire pour soigner l’insuffisance cardiaque. Cela matérialise la versatilité de notre plateforme de bio-impression et l’extension de son portefeuille d’applications. »

Soulignant l’intérêt grandissant pour sa technologie de bioimpression, Poietis a officialisé un autre rapprochement il y a quelques jours. Il concerne cette fois-ci un partenaire espagnol dénommé CREATIO, le Centre de Production et de Validation des thérapie innovantes (MTI) de l’Université de Barcelone (UB). Celui-ci a l’intention d’utiliser sa plateforme de bioimpression NGB dans le cadre de diverses collaborations en recherche fondamentale et translationnelle, mais aussi la fabrication de médicaments de thérapie innovantes (MTI) pour d’autres hôpitaux en Espagne.

Alexandre Moussion