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Etre Partnership & Channel Manager chez Materialise en quoi ça consiste ? Rencontre avec Antoine Guyot

Antoine Guyot

PRIMANTE3D poursuit son tour d’horizon des différents métiers que génère l’industrie de la fabrication additive. De technicien en mise en service à responsable d’offre et supply chain, nous avons déjà pu observer la grande diversité de profils et de compétences nécessaires que sont amenés à recruter les entreprises, qu’elles soient spécialisées dans l’impression 3D, ou traditionnelles. Dans le vaste écosystème de cette technologie, je me suis aujourd’hui intéressé à la partie logicielle. Chez Materialise, l’un des leaders mondiaux pour ce qui est des software d’impression 3D et médical, et du service d’impression 3D, Antoine Guyot endosse deux rôles clefs : Partnership & Channel Manager. Celui-ci a accepté de nous partager son travail du quotidien, les exigences et sources de satisfaction de son métier.

« Rien ne me satisfait plus que de voir nos clients découvrir de nouvelles applications pour la fabrication additive »

Antoine Guyot

Antoine Guyot

Bonjour Antoine, pourrais-tu nous raconter le parcours scolaire et professionnel qui t’a conduit jusqu’au poste de Partnership & Channel Manager chez Materialise ?

Bien sûr ! J’ai compris très jeune que j’avais la fibre commerciale. Dès l’enfance, j’achetais des bonbons avec mon argent de poche et les revendais à l’unité à mes camarades dans la cour de récré ! (Si tu veux en acheter : c’étaient des grenades piquantes).

J’aimais aussi les matières scientifiques et, bien que fan de Sciences et Vie Junior, je me suis finalement dirigé vers une école de commerce. J’avais trouvé ma voie !

C’est lors d’un projet de conseil lors de mon deuxième master que j’ai découvert la fabrication additive. J’ai rapidement compris le potentiel de cette technologie et je me suis passionné pour ses applications dans diverses industries. Par chance, en 2016, HP recrutait avant de lancer sa nouvelle technologie HP MultiJet Fusion sur le marché. C’était le rôle parfait pour combiner ma curiosité technique à ma fibre commerciale. Ma carrière dans la 3D commençait officiellement !

Après plusieurs rôles en vente directe et indirecte chez HP, Stratasys et Carbon, Materialise m’a recruté en 2023 pour développer les partenariats stratégiques de sa division Software. Depuis fin 2024, j’ai également pris en charge la responsabilité du réseau de distribution pour l’Europe du Sud.

« Nous avons des logiciels leaders sur leurs marchés et surtout nous les utilisons directement dans nos activités de service-bureau »

Pour ceux qui découvriraient Materialise, dis-nous en plus sur son histoire et ses activités ? Quelle expertise et savoir-faire distingue cette entreprise dans le domaine de la fabrication additive ?

Materialise c’est l’histoire de Fried Vancraen, notre fondateur au début des années 90. Il commença un petit service bureau avec une machine de stéréolithographie. Mais des erreurs de fabrication à répétions l’amena à chercher des solutions… Fried compris vite qu’une partie des erreurs était liées à la préparation des fichiers en amont de la fabrication. Il s’est mis à coder un logiciel avec quelques ingénieurs et en voyant les résultats, ils crièrent « MAGIE ». Magics V1 était né ! (Bon j’admets, le cri ça tient plutôt de la légende… En réalité, Magics signifie: Materialise Automatic Generator and Interactive Controller for Supports).

Avec ses compères, ils ont aussi vite vu un parallèle entre l’imagerie médicale en 2D et la création de modèles 3D. Pourquoi donc se limiter à visionner en 2D ? La division médicale de Materialise prenait vie. Leur but ? Implémenter des solutions de planification chirurgicale et améliorer la qualité de vie des patients.

Aujourd’hui nous avons 3 divisions : Software (logiciels industriels), Medical (logiciels médicaux et implants), et Manufacturing qui offre des services de fabrication de pièces et de conseils en fabrication additive.

Ce qui nous différencie ? Trois décennies d’expérience et de leadership dans la fabrication additive, plus que la majorité des entreprises. Nous avons des logiciels leaders sur leurs marchés et surtout nous les utilisons directement dans nos activités de service-bureau. Nous sommes à la fois fournisseurs et consommateurs de nos propres solutions ce qui nous permet de réellement comprendre les défis opérationnels de nos clients dans l’industrie.

« C’est en entrant dans le processus de recrutement chez HP que j’ai réellement approfondi mes connaissances sur les différentes technologies en polymères »

Dans quelles circonstances as-tu découvert l’impression 3D, et comment t’es-tu formé à cette technologie ?

Comme mentionné précédemment, c’est grâce à ce projet de conseil que j’ai découvert la 3D. L’entreprise s’appelait Xilloc Medical et produit encore aujourd’hui des implants médicaux personnalisés. J’avais peut-être saisi le potentiel de la technologie, mais je dois avouer qu’à l’époque, j’étais incapable d’expliquer comment fonctionnait une imprimante (du SLS de chez EOS, en l’occurrence) !

C’est en entrant dans le processus de recrutement chez HP que j’ai réellement approfondi mes connaissances sur les différentes technologies en polymères. Puis, une fois tombé dans la marmite, je n’ai cessé de me former sur le sujet. Je ne regrette en rien mon passage chez Stratasys, qui m’a exposé à de nouvelles technologies et matériaux. Ma courbe d’apprentissage a ainsi été décuplée ! J’adore, par exemple, la science derrière le comportement des matériaux.

« En tant que responsable de partenariats stratégiques, mon objectif est d’identifier les acteurs clés de la chaîne de valeur de la fabrication additive… »

Explique nous en quoi consiste exactement le rôle d’un Partnership & Channel Manager ?

Je combine actuellement deux rôles. Heureusement, ils sont complémentaires et je profite des synergies que chacun apporte. En tant que responsable de partenariats stratégiques, mon objectif est d’identifier les acteurs clés de la chaîne de valeur de la fabrication additive et de mettre en place des modèles commerciaux où nos produits, combinés à ceux de nos partenaires, apportent une réelle valeur ajoutée aux utilisateurs. Un exemple concret : certains de nos clients du logiciel CO-AM utilisent des imprimantes Stratasys. CO-AM étant un outil de gestion des flux de production, nous avons intégré les imprimantes Stratasys afin d’offrir un monitoring précis de celles-ci.

En tant que responsable du réseau du réseau de distribution, mon rôle est d’accompagner nos revendeurs dans la vente de nos logiciels. Il s’agit de les guider, les former, les assister face aux clients, mais aussi, dans certains cas, de recadrer ou résoudre des conflits. Ce n’est pas, pour moi, un simple rôle de suivi des ventes. Je ne suis pas là juste pour contrôler. Je me considère plutôt comme un facilitateur.

Il s’agit d’une véritable symbiose à mettre en place avec les revendeurs. Materialise est le cerveau, le cœur ; notre réseau de distribution, ce sont nos bras, nos jambes, nos yeux et nos oreilles sur le terrain. C’est grâce à eux que nous avançons, et c’est à moi de leur apporter l’énergie et les moyens nécessaires pour les motiver à promouvoir nos solutions auprès des utilisateurs finaux.

« Les processus en place varient énormément d’un secteur à l’autre… Il est très difficile pour un commercial de maîtriser tous ces domaines »

Quelles sont les spécificités de ce métier dans une entreprise comme Matérialise ?

Très bonne question ! Passer de l’imprimante 3D industrielle au Software n’a pas été chose facile. Dans les deux cas, il est primordial de comprendre comment fonctionnent les différentes industries. Les processus en place varient énormément d’un secteur à l’autre… Il est très difficile pour un commercial de maîtriser tous ces domaines. On parle souvent du jargon de l’automobile… mais essayez donc de comprendre celui du dentaire !

Heureusement, j’ai toujours été très bien accompagné dans ma carrière par des ingénieurs d’application exceptionnels, qui connaissaient parfaitement leur métier. Dans le Software, il m’a également fallu appréhender toute la dimension digitale et les implications techniques des infrastructures réseau mises en place.

« Heureusement, la complémentarité de mes fonctions me permet d’équilibrer la charge et d’éviter une trop forte pression simultanée »

Peux-tu nous donner un aperçu de ta semaine ?

Je dois jongler entre mes deux rôles. Les partenariats sont des projets à long terme, ce qui me permet d’anticiper et d’organiser mon temps de travail. En revanche, le Channel est un domaine hyper dynamique. J’alterne entre des réunions clients, distributeurs et partenaires, ainsi que des réunions internes pour aligner notre stratégie sur les projets en cours.

Heureusement, la complémentarité de mes fonctions me permet d’équilibrer la charge et d’éviter une trop forte pression simultanée. Évidemment, il y a aussi beaucoup d’e-mails… Je voyage régulièrement au siège de Materialise en Belgique pour rencontrer les équipes, mais aussi chez les clients, partenaires ou lors d’événements.

Néanmoins, niveau voyage, c’est plus facile à gérer que lors de mes expériences précédentes. Ce qui importe pour moi, c’est de m’épanouir au travail tout en profitant de ma vie personnelle et de mes passions, comme le triathlon. Pour l’instant, j’ai la chance de pouvoir dire que je vis heureux !

« Quand un client te rappelle, te témoigne sa confiance et te recommande, tu sais que tu as fait du bon travail »

Qu’est-ce qui te procure le plus de satisfactions dans ton métier, et à l’inverse, quels sont les défis et contraintes auxquels tu dois faire face au quotidien ?

Rien ne me satisfait plus que de voir nos clients découvrir de nouvelles applications pour la fabrication additive. C’est une fierté de me dire que j’ai pu contribuer à leurs innovations ! Lorsque ces applications ont un impact concret, dans le domaine médical par exemple, cette satisfaction est décuplée. Je pense notamment à la start-up innovante Odapt, qui me tient particulièrement à cœur.

Une autre grande satisfaction est d’être reconnu par mes clients pour mon intégrité. Je n’ai jamais menti ni enjolivé pour vendre. J’aime être direct et sincère envers tous. Il n’y a rien de mieux pour moi qu’une relation de respect entre client et fournisseur. Quand un client te rappelle, te témoigne sa confiance et te recommande, tu sais que tu as fait du bon travail.

Des contraintes, il y en a toujours. J’évolue dans un environnement technique, face à des ingénieurs talentueux. C’est un défi constant de rester au niveau ! Souvent, il faut aussi prendre des décisions importantes dans un laps de temps très court. J’ai peut-être plus de cheveux blancs qu’au début de ma carrière, mais c’est aussi pour ça que je fais ce métier !

Fort de ton expérience, quelles qualités estimes-tu essentielles pour réussir dans ce métier ?

La sincérité et les connaissances techniques et beaucoup de niaque ! Je suis une personne hyper disciplinée et pro-active dans ma vie pro et privée. Les résultats ne tomberont que si je continue de m’efforcer tous les jours afin d’atteindre mes objectifs. Alors si je peux me permettre de prodiguer un conseil : c’est ok de rester un soir sur son canapé, mais le lendemain matin, levez-vous et saisissez les opportunités !

« Avant c’était un peu chacun pour soi, maintenant je constante que l’on préfère s’unir afin d’avancer plus loin »

Ton métier te place aux premières loges sur la situation actuelle du marché de l’impression 3D. Quel est ton analyse sur l’année qui vient de s’écouler et les perspectives pour 2025. Les dernières données disponibles pour 2024, montrent une meilleure santé des fournisseurs de services que la vente de machines.

Au niveau global, l’industrie est en croissance, mais localement, et je le confirme, surtout chez les OEM d’imprimantes occidentaux on constate beaucoup de « vagues ». Chez Materialise, nous sommes encore assez préservés du fait de notre position sur le marché, la qualité reconnue de nos solutions et nos résultats dans certains pays et régions.

Cela dit, la vigilance s’impose, en une décennie dans la fabrication, j’ai vécu des attentes démesurées et puis finalement un ralentissement de la croissance une fois la bulle spéculative explosée.

J’ai confiance néanmoins, la chaîne de valeur offre des solutions de plus en plus matures à tous les niveaux. Les collaborations et partenariats stratégiques commencent enfin à offrir une vraie valeur-ajoutée aux utilisateurs finaux. Avant c’était un peu chacun pour soi, maintenant je constante que l’on préfère s’unir afin d’avancer plus loin.

Alexandre Moussion