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En quoi consiste le métier de chargé d’affaires en impression 3D ? Rencontre avec Guillaume Moranvillier de G-Eco

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Si l’impression 3D s’impose peu à peu comme un levier de transformation industrielle, derrière cette technologie se cachent des hommes et femmes qui par leurs parcours et savoirs-faire, la rendent chaque jour un peu plus concrète. Après vous avoir fait découvrir le métier de Partnership & Channel Manager à travers Antoine Guyot de Materialise, nous partons cette fois-ci à la rencontre de Guillaume Moranvillier. Chargé d’affaires en impression 3D depuis plus d’un an, il évolue au sein de chez G-Eco , une entreprise bordelaise pas tout à fait comme les autres, à la croisée de l’industrie, de la technologie et de l’inclusion. Dans cette interview, Guillaume revient sur son parcours, son quotidien, les missions de G-Eco et les projets qui l’animent.

« Ce qui m’apporte le plus de satisfaction est de pouvoir suivre l’ensemble d’un projet tout en construisant une relation saine avec un client »

Guillaume Moranvillier

Guillaume Moranvillier

Bonjour Guillaume, voilà plus d’un an que tu exerces le métier de chargé d’affaires en impression 3D chez G-ECO. Raconte-nous le parcours qui t’a amené jusqu’à ce poste ?

Bonjour Alexandre, mon parcours a débuté par la réalisation d’un DUT Mesures Physiques à Bordeaux qui m’a entre autres permis de découvrir les thèmes de la mécanique et des matériaux. J’ai alors poursuivi mon cursus au sein de l’ENSAM (Ecole Nationale Supérieur des Arts et Métiers) pour réaliser une formation d’ingénieur en génie mécanique, spécialisée sur les procédés avancés de fabrication.

Cette formation avait pour atout de nous former à la fois aux procédés de fabrication conventionnels (usinage, formage, etc…) mais aussi aux procédés de fabrication additifs (plastiques et métalliques via notamment l’intervention d’enseignants chercheurs spécialisés dans les procédés SLM). J’ai ensuite intégré Cylaos, distributeur d’imprimantes 3D sur plusieurs marques et technologies, en tant que responsable technique. J’y avais des missions opérationnelles comme la formation en clientèle, la maintenance des machines ainsi que des activités d’ingénierie d’application, mais aussi des missions plus organisationnelles via la gestion du parc interne, des plannings d’équipe ou encore la mise en place de processus qualité tel que la certification Qualiopi.

Il y a un an et demi, j’ai décidé de rejoindre G-eco pour des raisons personnelles d’une part, mais surtout professionnelles avec l’envie d’intégrer une entreprise portant un projet d’inclusion fort. Le fait de travailler davantage sur les pièces produites et les solutions qu’elles apportent, plutôt que sur les moyens de fabrication eux-mêmes a également été un facteur de choix. J’occupe depuis lors un poste de chargé d’affaires.

« Mon intérêt pour cette technologie n’a alors fait que croitre jusqu’à souhaiter en faire le cœur de mon activité professionnelle »

Comment ton intérêt/passion pour l’impression 3D a t-elle débuté ?

Mon premier contact avec l’impression 3D a eu lieu au FabLab de l’IUT de Bordeaux. J’ai pu y découvrir ses atouts lors de la réalisation de certains travaux pratiques nécessitant la création de petites pièces. J’ai alors vite acheté ma première imprimante personnelle, c’était encore l’époque où il n’y avait pas d’autre choix que de la monter soi-même.

Lorsqu’est venu le choix de poursuivre mes études vers un cursus d’ingénieur et qu’on nous a présenté cette formation dont une part importante était consacrée à la fabrication additive, cela m’a paru tout naturel de m’y diriger. Mon intérêt pour cette technologie n’a alors fait que croitre jusqu’à souhaiter en faire le cœur de mon activité professionnelle.

« Concrètement, plus de la moitié des collaborateurs sont reconnus comme étant en situation de handicap »

G-Eco n’est pas une entreprise d’impression 3D comme les autres. Dis-nous en plus sur ses missions et son ADN ?

Effectivement, G-eco se démarque d’abord et avant tout par son statut d’entreprise adaptée. Concrètement, plus de la moitié des collaborateurs sont reconnus comme étant en situation de handicap. Nous nous démarquons à plusieurs niveaux. D’abord en proposant des stages ou immersion en milieu professionnel générant de belles vocations chez nos stagiaires.

Puis pour ceux qui souhaitent prolonger l’aventure nous construisons des parcours de formation à nos métiers. Ces formations permettent ensuite d’occuper des postes en bureau d’étude, production et parachèvement d’abord chez nous puis chez nos partenaires.

Nous exploitons sur site les 3 principales technologies plébiscités en impression 3D à savoir la FDM, la SLA et le SLS avec plus de 30 matériaux qualifiés. Nous sommes par ailleurs la seule entreprise de la région Bordelaise à posséder des moyens de fabrication en frittage de poudre polymères, permettant une production en série allant jusqu’à plusieurs milliers de pièces par mois.

Nos prestations s’adressent essentiellement aux industriels pour lesquels nous proposons des services de modélisation allant du simple retro engineering jusqu’à la conception de A à Z sur cahier des charges. Puis nous produisons via notre parc machines jusqu’aux phases de montage, d’assemblage et de post-traitement éventuelles telles que la mise en peinture par exemple.

« l’OETH impose aux entreprises de plus de 20 salariés d’employer au moins 6% de travailleurs reconnus handicapés sur leur effectif total »

Peux-tu rappeler ce qu’est l’OETH et la Loi handicap, et ce que cela implique pour une entreprise ?

L’Obligation d’Emploi des Travailleurs Handicapés a été instaurée en 1987, elle a été largement renforcée avec la loi dite Loi handicap de 2005. Lors de sa promulgation l’OETH impose aux entreprises de plus de 20 salariés d’employer au moins 6% de travailleurs reconnus handicapés sur leur effectif total. Dans le cas où ce quota n’est pas atteint, les entreprises en question sont redevables d’une contribution à l’AGEFIPH.

Il n’est pas toujours aisé pour les entreprises de remplir ces obligations. Il existe pourtant d’autres mécanismes permettant de diversifier facilement sa stratégie RSE : Accueillir des personnes en situation de handicap en stage ou en période de mise à disposition (MAD).

Faire appel à des Entreprises Adaptées comme G-Eco, des ESAT ou bien des travailleurs handicapés indépendants. Par exemple lorsqu’un client fait appel à nos services il pourra optimiser sa contribution AGEFIPH en réintégrant une part importante du CA réalisé ensemble. Faire appel à G-Eco c’est comme si vous embauchiez des personnes en situation de handicap.

« Avant tout, le chargé d’affaires a pour responsabilités le développement commercial de l’entreprise sur des secteurs qu’elle considère clés »

En quoi consiste exactement le métier de chargé d’affaires en impression 3D ?

Le métier de chargé d’affaires possède plusieurs facettes. Avant tout, le chargé d’affaires a pour responsabilités le développement commercial de l’entreprise sur des secteurs qu’elle considère clés ou sur lesquelles elle souhaite se développer. Dans mon cas, je contribue notamment au développement de certains secteurs que nous maîtrisons bien aujourd’hui tel que le conditionnement, particulièrement agroalimentaire et pharmaceutique.

Mes activités passent donc à la fois par des phases de prospection et de RDV clients. Mon rôle est ensuite d’identifier avec le client ses besoins et d’établir son cahier des charges pour voir comment nous pouvons y répondre. Puis, je transmets l’ensemble des informations techniques nécessaires au bureau d’étude afin que celui-ci puisse proposer la meilleure solution. J’établis alors les devis, suit leurs mises en œuvre et m’assure à postériori de la bonne intégration de nos solutions chez nos clients.

« Dans le contexte actuel, pour nos clients être capable de faire plus avec le même outil de production est indispensable »

Peux-tu nous présenter un projet porté par G-ECO qui t’a particulièrement marqué, et nous expliquer quel a été ton rôle ?

Il est difficile de ressortir un projet en particulier, mais si je dois citer un exemple, j’ai en tête un client dans le secteur de l’embouteillage. Client pour lequel l’action commerciale puis technique a pu être menée de bout en bout.

Ainsi, j’ai d’abord pu lui présenter notre activité et nos capacités, notamment dans ce secteur. Celui-ci a tout de suite compris comment nous pouvions l’accompagner. Au bout de quelques jours, il nous a sollicité pour un sujet d’amélioration de pièces de guidage sur une machine de rinçage avec laquelle il avait des problèmes sur certains formats de produits qui dégradaient grandement les cadences de ligne.

Le client a d’abord proposé la mise en plan d’une pièce qui devait permettre un meilleur guidage des bouteilles. Nous avons alors pu enchaîner rapidement quelques itérations sur lesquels le client apportait ses ajustements et moi, nos contraintes de production et avis techniques. Après 2 itérations, les pièces ont pu être testées en condition pendant quelques semaines avant que le client décide de commander l’ensemble des pièces nécessaires au fonctionnement de la machine.

Quelques mois plus tard, le client revenait vers nous pour confirmer que les guident fonctionnaient comme souhaité et avaient largement contribué à l’augmentation de la productivité de la machine. Dans le contexte actuel, pour nos clients être capable de faire plus avec le même outil de production est indispensable.

J’ai pu dans ce projet présenter et démontrer nos capacités et savoirs-faire mais surtout comment nous pouvions travailler ensemble. Puis, apporter directement mon expertise technique pour enchaîner rapidement les itérations. Enfin, assurer le suivi et le bon déroulement dans les temps de l’intégration des pièces et de leur bon fonctionnement.

« Le fait que cette activité se construise autour d’un projet inclusif plus global est d’autant plus valorisant »

Quels aspects de ton métier t’apportent le plus de satisfactions ? À quels types de contraintes dois-tu faire face ?

Ce qui m’apporte le plus de satisfaction est de pouvoir suivre l’ensemble d’un projet tout en construisant une relation saine avec un client, et de constater que celui-ci sort pleinement satisfait de la prestation de l’ensemble de l’équipe, que ce soit commercialement ou techniquement. Il est toujours valorisant d’avoir identifié un prospect et de voir que celui-ci devient un client régulier grâce aux conseils et solutions apportées. Le fait que cette activité se construise autour d’un projet inclusif plus global est d’autant plus valorisant.

Les contraintes tiennent plus de la frustration commerciale car certaines périodes de l’années sont plus propices que d’autres à la création de nouveaux projets, et il faut parfois aller chercher les clients pour les convaincre d’avancer sur des projets pour lesquels ils ne donnent pas toujours la priorité.

« Il faut savoir écouter et oser poser les bonnes questions afin de gagner en efficacité par la suite dans le traitement des sujets »

Selon toi, quelles sont les qualités que tu estimes indispensables pour exercer ce métier, et à l’inverse rédhibitoires ?

Il est selon moi indispensable d’apprécier le contact client et d’aimer travailler avec des objectifs commerciaux réguliers. Il est également important d’avoir une certaine appétence technique car la majorité des échanges se font avec des interlocuteurs techniques. Il faut pouvoir parler le même langage qu’eux et comprendre les enjeux et besoins des projets.

A l’inverse Ne pas oser décrocher le téléphone, rester cantonné aux projets entrants sera en revanche un très gros frein pour ce métier, qui nécessite d’être à l’aise dans les relations sociales, tout en ayant confiance dans les solutions que l’on apporte. Il faut savoir écouter et oser poser les bonnes questions afin de gagner en efficacité par la suite dans le traitement des sujets.

Quels conseils donnerais-tu à quelqu’un qui souhaiterait l’exercer ?

Il faut savoir être patient et persévérer. Un premier contact client ne peut déboucher qu’un an plus tard mais aboutir à de beaux projets. Il est important de conserver de bons rapports avec ses clients, de garder un contact régulier afin de s’assurer que les projets réalisés lui donnent satisfactions, sur le long terme.

L’idée est de pouvoir apporter des solutions à ses besoins à tout moment. Il est de fait important de toujours faire preuve de pédagogie sur nos moyens et nos méthodes. Permettre aux clients de comprendre nos capacités et nos besoins pour répondre à leurs projets permets en règle générale d’aboutir à des échanges apaisés et de faire avancer le projet plus vite car chaque parti comprend les problématiques de l’autre.

« Les productions en frittage de poudre ont particulièrement le vent en poupe car elles arrivent à se positionner sur des marchés de petite et moyenne série »

Pour conclure, quel est ton regard sur l’évolution du marché de l’impression 3D en 2025, et ses perspectives pour 2026 ?

Aujourd’hui, de plus en plus de clients industriels s’équipent d’imprimantes, surtout des petits modèles FDM afin de répondre à des besoins simples sur du prototype ou de la pièce détachée « quick fix ». Le marché de la sous-traitance s’est donc resserré sur des besoins de pièces séries ou bien de pièces mécaniques à forte valeur ajoutée et faisant appel à des matériaux techniques (répondant à des normes particulières ou possédants des propriétés mécaniques importantes).

Je pense que cette tendance va se poursuivre, les clients cherchent une expertise complète allant de la modélisation à la production. Les productions en frittage de poudre ont particulièrement le vent en poupe car elles arrivent à se positionner sur des marchés de petite et moyenne série. Malgré une concurrence étrangère forte sur ces technologies, les avantages liés à notre statut d’Entreprise Adaptée allié à une grande réactivité et notre expertise métier nous permettent d’être parmi les sous-traitants Français très actifs sur le marché.

Concernant la FDM, malgré des aprioris négatifs notamment sur les propriétés mécaniques des pièces, la technologie n’a pas dit son dernier mot grâce à la grande diversité de matériaux disponibles, de plus en plus techniques et aux coûts encore raisonnablement bas.

*Crédits de toutes les photos : Virginie Vanbavinckhove / G-Eco

Alexandre Moussion