Essentiels à l’accélération du déploiement de l’impression 3D, le développement de nouveaux matériaux constituent l’une des clefs de voûte de cette technologie. Sur ce marché en plein essor qui devrait dépasser le milliard de dollars en 2019, les thermoplastiques sont actuellement les matériaux les plus matures et les plus utilisés en fabrication additive. Avec la professionnalisation des usages on assiste aujourd’hui à une montée des polymères techniques haute performance, dont le fameux PEEK. Caractérisé par une combinaison étonnante de propriétés de résistance, ce plastique intéresse de plus en plus d’industriels. Responsable technique chez Neofab, Thomas Bonnet nous livre les clefs de ce matériau d’impression 3D en 10 questions.
« c’est grâce à sa cristallisation que le PEEK développe des propriétés mécaniques très intéressantes »
Thomas bonjour, pourrais-tu présenter Neofab et définir tes fonctions ? En quoi consiste ton rôle de responsable technique ?
Neofab est un intégrateur de solutions d’impression 3D industrielles. Notre but est de fournir à nos clients les meilleurs conseils et solutions afin de répondre à leurs besoins de fabrication additive professionnels. Nous proposons à ce jour plusieurs technologies d’impression 3D en fonction du besoin évoqué chez nos clients. Nos équipements permettent l’impression 3D de matériaux techniques, Grand Format, Métal, Composite et Haute température (PEEK, PEKK et Ultem).
Mon rôle chez Neofab est de fournir un suivi technique à nos clients. Le but est de les accompagner après avoir installé leur imprimante. Chez Neofab on parle de solutions industrielles plus que d’imprimantes 3D car nous proposons des technologies innovantes, le client a donc besoin d’un accompagnement plus poussé.
« le Polyétheréthercétone est un polymère de la famille des Polycétones »
1 – La professionnalisation des usages de l’impression 3D a entraîné une montée des matériaux techniques haute performance dont le PEEK. Pourrais-tu nous présenter ce thermoplastique ?
Le PEEK (Polyétheréthercétone) est un polymère de la famille des Polycétones (PEK, PEEK, PEEKK, PEAK, PEEKK, PEKK, PEKEKK). Il a la particularité de nécessiter des températures très élevées pour pouvoir être imprimé avec succès.
2 – En terme de propriétés chimiques, qu’est-ce qui différencie le PEEK des autres plastiques amorphes ?
A la différence des autres plastiques amorphes, le PEEK est catégorisé comme semi-cristallin. C’est-à-dire qu’environ 30% de la masse du matériau cristallise pendant l’impression. En termes de réaction chimique, le matériau change de densité pendant l’impression puis il se contracte lorsqu’il refroidit.
Le phénomène de cristallisation rend donc le processus d’impression plus complexe à gérer par rapport aux matériaux amorphes. L’impression du PEEK nécessite une température d’extrusion entre 400 et 450°C, ainsi qu’une enceinte chauffée à 120 °C. Cependant c’est grâce à sa cristallisation que le PEEK développe des propriétés mécaniques très intéressantes.
« ses résistances dépassent tout ce qui se fait sur le marché »
3 – Quelles sont les propriétés mécaniques qui en découlent ?
C’est ici que le PEEK se démarque par rapport aux autres matériaux d’impression plus classiques, ses résistances dépassent tout ce qui se fait sur le marché :
Résistance aux températures élevées (260°C)
Forte résistance à la traction
Forte résistance aux déformations
Résistance à une grande quantité de produit chimique
Résistance à l’usure
Matériau isolant
Propriété autoextinguible : les pièces imprimées en PEEK s’éteindront d’elles-mêmes si elles prennent feu.
Matériau stérilisable
Certains fabricants comme Solvay ont également développé un PEEK renforcé en fibre de carbone pour accroitre encore plus les résistances et propriétés mécaniques des pièces imprimées.
« Le PEEK excelle lorsqu’il est soumis à de fortes contraintes dans des environnements difficiles »
4 – Ses caractéristiques techniques en font un matériau très prisé dans certains domaines. Quels sont-ils ? Donne nous des applications concrètes.
Ce qui est intéressant avec le PEEK, c’est que grâce à ses propriétés complètes il peut être utilisé dans de nombreux domaines. Pour le moment nous avons identifié 3 secteurs d’activités qui se démarquent par leur forte demande : le secteur médical, aérospatial / aéronautique et automobile.
Le PEEK excelle lorsqu’il est soumis à de fortes contraintes dans des environnements difficiles c’est pourquoi ces secteurs d’activité s’intéressent fortement au matériau.
Des pièces en PEEK sont actuellement utilisées pour remplacer l’aluminium dans l’aéronautique. Ce domaine très compétitif protégé par les clauses de confidentialité ne nous permet pas d’avoir des cas d’applications concrets. Mais nous savons que le PEEK est un enjeu majeur pour différentes raisons :
– Les pièces imprimées en PEEK résistent à des températures plus élevées
– Sa caractéristique de matériau autoextinguible
– Son rapport poids/résistance permet des économies de poids et de carburant
– Il permet d’isoler les composants électriques.
« le PEEK est biocompatible et stérilisable, cela ouvre beaucoup de possibilités pour le domaine médical »
5 – Le PEEK est-il biocompatible ?
Oui le PEEK est biocompatible et stérilisable, cela ouvre beaucoup de possibilités pour le domaine médical. Après des analyses, des chercheurs se sont rendus compte que les implants imprimés en PEEK ont des caractéristiques très similaires à celles de l’os humain.
Cela le rend beaucoup plus intéressant que les matériaux présents sur le marché actuellement comme le titane et l’acier. Notamment pour l’ostéo-intégration, les implants en PEEK permettent une meilleure croissance des cellules osseuses et tissus humains. La guérison est plus rapide et le risque de complications à long terme fortement réduit.
6 – Quelles sont les couleurs disponibles avec ce matériau ?
Le PEEK est disponible en deux couleurs, en beige pour sa version classique et en noir pour sa version renforcée en fibre de carbone. Sa couleur évolue ensuite lors de l’impression en fonction de la cristallisation. Ici grâce à la photo on voit bien la différence de couleur entre une cristallisation réussie et une cristallisation trop faible.
7 – Le PEEK est-il compatible avec d’autres procédés d’impression 3D que le FDM ?
Oui le PEEK est également compatible avec le SLS par exemple.
8 – Quel est le prix moyen du filament ?
Environ 400 € H.T. la bobine de 500 grammes.
« il dépasse l’ULTEM® sur les propriétés et résistances mécaniques »
9 – Quels sont les atouts du PEEK par apport à d’autres matériaux haute performance tels que l’ULTEM® mais aussi les métaux ?
Outre ces résistances mécaniques élevées, un avantage important du PEEK sur les métaux est sa résistance aux fortes températures et plus particulièrement sa faible conduction thermique. Par exemple dans le domaine médical, l’acier est un matériau qui subit des changements de température assez rapidement. Cela peut poser problème pour la santé du patient. Avec des implants en PEEK, ce problème ne se pose pas.
Par rapport aux autres thermoplastiques comme l’ULTEM®, le PEEK dépasse l’ULTEM® sur les propriétés et résistances mécaniques. L’ ULTEM® est en contrepartie moins cher que le PEEK.
10 – Le PEEK a aussi ses variantes. Quelles sont-elles ?
La variante qui concurrence le PEEK est le PEKK. Les propriétés sont très semblables mais c’est au niveau de la facilité d’impression que le PEKK se démarque. Le PEKK est à mi-chemin entre le matériau amorphe et le semi-cristallin et ses températures de fusion et de transition vitreuse sont plus hautes.
Cela permet d’imprimer le matériau dans son état amorphe puis le recuire en guise de « post-traitement » afin qu’il cristallise et développe ses résistances. Le procédé d’impression reste alors simple tout en ayant une pièce finie très résistante.
Delta Equipement s’associe à Solvay pour développer des filaments d’impression 3D PEEK et PPSU
Filament ASA pour une utilisation en extérieur
Un matériau de support soluble pour l’impression 3D de PEEK
Un nouveau matériau de support détachable pour l’impression 3D de l’ULTEM
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