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Des chercheurs développent une technique d’impression 3D pour le latex

matériau latex

Issu de la transformation d’un suc végétal produit par l’hévéa, le latex est un matériau élastique qui est aujourd’hui très largement utilisé dans l’industrie. Ses propriétés uniques de résistance et de flexibilité, reproductibles également de manière synthétique à partir de monomères issus d’hydrocarbures, en font un produit irremplaçable pour de nombreux usages, aussi bien dans le domaine du transport pour la fabrication de pneus après sa transformation en caoutchouc, que du médical pour des gants par exemple ou des préservatifs.

Si les élastomères commencent enfin à se faire une place sur le marché de la fabrication additive, leurs propriétés si particulières les rendent particulièrement difficiles à imprimer en 3D. Ils ne sont que quelques fabricants, parmi lesquels l’allemand Wacker à l’origine de la première solution industrielle, l’américain San Drawn, le britannique Fripp Design et le français Sterne, à avoir trouvé la bonne formule pour rendre ce matériau compatible avec la fabrication additive.

Aux Etats-Unis, une nouvelle percée scientifique a été réalisée par un groupe interdisciplinaire de chercheurs de l’Institut d’innovation des macromolécules (MII) de Virginia Tech, et une équipe de Michelin Amérique du Nord. Dans une récente publication les protagonistes racontent comment ils ont mis au point un nouveau matériau en latex imprimable en 3D.

impression du latex par stéréolithographie

Procédé de stéréolithographie pour l’impression 3D de latex mis au point par le VTU (crédits photo : VTU)

Phil Scott, un étudiant en cinquième année du Long Research Group et membre de l’équipe de recherche, serait parvenu à synthétiser le latex pour obtenir le poids moléculaire et les propriétés mécaniques souhaités pour l’impression 3D. Ce faisant il se serait aperçu que le latex à l’état liquide était extrêmement fragile et difficile à modifier chimiquement. « Le latex est dans un état zen. Si vous y ajoutez quelque chose, il perdra complètement sa stabilité et se brisera. » Explique Viswanath Meenakshisundaram, doctorant en génie mécanique.

La solution trouvée a été d’ajouter des photo-initiateurs et d’autres composés à un mélange de latex liquide, de manière à créer un échafaudage entourant les particules de latex pour les maintenir en place et leur permettre de fusionner ensemble. Avec cette formulation, le latex liquide peut être utilisé avec les techniques de stéréolithographie permettant habituellement de polymériser des résines.

Selon Meenakshisundaram le développement d’une machine SLA personnalisée n’aurait pas permis de parer à toutes les difficultés. Il explique que les particules fluides du latex provoquaient une dispersion en dehors de la lumière UV projetée sur la surface de la résine de latex, qui entraînait au final des défauts d’impression. Pour résoudre ce problème, l’imprimante a été équipée d’une caméra de manière à obtenir une image de chaque cuve de résine de latex. Un algorithme personnalisé permet à la machine d’évaluer l’interaction de la lumière ultraviolette sur la surface de la résine, et d’ajuster automatiquement les paramètres d’impression pour corriger la dispersion de la résine et ne durcir que la partie souhaitée.

« Ce travail élargit les possibilités d’impression d’élastomères avec des caractéristiques complexes »

équipe de recherche

Les chimistes et des ingénieurs des groupes de recherche de Timothy Long et Christopher Williams qui ont collaboré à ce projet. (crédits photo : VTU)

Afin de tester sa fonctionnalité, l’équipe VTU a imprimé plusieurs objets en latex. Les résultats seraient plus que convaincants, puisque non seulement les impressions auraient présenté un niveau élevé de détail, mais leur résistance serait sensiblement améliorée par rapport aux latex traditionnels. L’équipe parle d’allongements supérieurs à 500%, avec une contrainte moyenne à la rupture de 9,7 MPa.

« Ce travail élargit les possibilités d’impression d’élastomères avec des caractéristiques complexes qui présentent des extensibilités supérieures à 500%, près de 200% au-dessus des principaux élastomères VP commerciaux », ont conclu les chercheurs de VTU. « L’accordabilité et la modularité de cette approche, lorsqu’elle est combinée à diverses compositions d’échafaudage et de particules polymères, suggère une polyvalence au-delà des latex et élastomères SBR. »

Alexandre Moussion