
Intégrant des fonctionnalités de détection de la chaleur et de la température, le segment de tuyau imprimé en 3D par le CSEM, marque une avancée significative dans la technologie de contrôle thermique, avec des applications allant des satellites aux systèmes industriels (crédit photo : CSEM)
L’aérospatial figure parmi les secteurs à forte valeur ajoutée où la fabrication additive peut exprimer ses atouts pour résoudre des problématiques, et de manière rentable. En Suisse, le CSEM (Centre suisse d’électronique et de microtechnique) qui est un centre de recherche et développement spécialisé dans la micro-fabrication de précision, la numérisation et l’énergie durable, a récemment communiqué sur l’utilisation de l’impression 3D pour créer un segment de tuyau innovant pour les systèmes avancés de gestion thermique des satellites.
Objectif ? Créer une solution plus performante et compacte, qui soit aussi capable de fonctionner de manière autonome et transmettre des données sans fils, en temps réel, et avec une meilleure efficacité. D’autant qu’il existe une forte demande pour les petits satellites, mais aussi ceux à très haut débit, et que leurs antennes actives nécessitent un refroidissement important en raison des nombreuses sources de chaleur générées, des flux thermiques élevés, d’une dissipation thermique importante, et des exigences strictes d’isothermie pour la chaîne d’amplification.
Développé en collaboration avec 5 autres partenaires dont Thales Alenia Space et Lisi Aerospace Additive Manufacturing, dans le cadre du projet européen AHEAD (pour Advanced Heat Exchange Devices) visant à révolutionner les systèmes de régulation thermiques, ce dispositif imprimé en 3D joue un rôle important dans le fonctionnement de ce que l’on appelle des « systèmes de refroidissement à pompage mécanique « .
Appelé au MPL, pour Mechanically Pumped Loop, ces systèmes de gestion thermique permettent de réguler la température dans des applications où des températures extrêmes peuvent affecter le bon fonctionnement des équipements. Dans le cadre des satellites par exemple, notamment ceux en orbite géostationnaire, la MPL prévient les problèmes de surchauffe en maintenant une température stable des composants, en transférant la chaleur des zones chaudes vers des régions plus froides.
Dans le cas présent on apprend que le recours à l’impression 3D a plus exactement porté sur un segment de tuyau, qui est un composant essentiel dans MPL. Equipé de capteurs, il permet de mesurer la chaleur et la température, garantissant ainsi un contrôle thermique optimal. Ce dernier est également rendu possible par le transport du fluide caloporteur, généralement de l’ammoniac, à travers un circuit fermé.
Ce dispositif pose néanmoins de sacrés défis de fabrication. Son architecture complexe impose l’assemblage de nombreuses pièces, ce qui implique aussi des itérations aussi chronophages que coûteuses. Par ailleurs, la plupart des systèmes de contrôle thermique utilisés aujourd’hui sont lourds, encombrants et nécessitent une myriade de câbles de connexion.
Au regard de sa liberté de conception, synonyme de personnalisation et d’allègement, la fabrication additive apparaît donc comme la solution idéale pour résoudre cette problématique. Sa capacité à produire des pièces avec plusieurs fonctions en une seule fois, est l’autre raison qui a poussé les protagonistes de ce projet à se saisir de cette technologie.
Parce que cette pièce, généralement en acier inoxydable, doit être conçue pour résister aux températures extrêmes et à la pression du fluide, le dispositif a donc été imprimé dans un acier inoxydable 316 L. Mesurant 150 millimètres pour un poids de seulement 15 grammes, il peut supporter des températures comprises entre -65°C et +85°C, ainsi qu’une pression d’ammoniac de 48 bars, garantissant ainsi un fonctionnement fiable dans des environnements extrêmes.
« La disposition des fils garantit un transfert de chaleur optimal tout autour du tube »

Détail de conception du tube : notez que la structure, le connecteur ainsi que les fils de chauffage et de routage sont tous imprimés en 3D lors de la même étape avec le même matériau (acier inoxydable 316L) (crédits photo : CSEM )
L’autre innovation surprenante dans ce système, tient dans la possibilité d’intégrer des fils chauffants qui eux aussi ont peuvent être fabriqués de manière additive. Imprimé avec le même inox 316 L, dans la surface interne du tuyau, ils assurent un transfert de chaleur uniforme autour du tube, ce qui représente une amélioration par rapport aux chauffages à film conventionnels, qui eux se limitent à un chauffage localisé.
« La disposition des fils garantit un transfert de chaleur optimal tout autour du tube », explique Hervé Saudan, Group Leader of Precision Mechanisms au CSEM et coordinateur du projet AHEAD. « Cette approche élimine le risque de délamination ou de déconnexion du câble souvent rencontré avec les films chauffants collés et les capteurs traditionnels. »
L’autre avantage de ce tube imprimé en 3D souligné par le CSEM, est qu’il est facile à installer dans un MPL, car le chauffage, le capteur et le connecteur font déjà partie du tube. Quant au procédé de fabrication additif employé, les protagonistes expliquent s’être appuyés sur une imprimante 3D à fusion laser sur lit de poudre.
L’un des grands avantages apportés par l’impression 3D, réside dans sa liberté de conception qui permet de mieux répondre à des besoins de personnalisation, pour intégrer ce type de dispositifs dans des endroits où cela n’était pas possible avant. Elle simplifie aussi l’installation des MPL en éliminant les processus complexes de collage et de câblage, ce qui a pour effet de réduire d’améliorer la fiabilité en supprimant les points de faiblesse que représentent les méthodes traditionnelles de fixation.
Comme le montre le schéma et la vidéo-ci dessous, une fois le dispositif imprimé, la fabrication est achevée par une injection de résine, puis un usinage.
« La faisabilité du concept a nécessité de relever des défis importants, notamment l’impression 3D de fils électriques longs et fins qui restent isolés électriquement de la structure du tuyau. » précise le CSEM. « Cet objectif a été atteint grâce à une conception unique impliquant des ponts sacrificiels, qui sont retirés une fois l’isolation durcie. La conception et le processus de fabrication innovants sont protégés par un brevet déposé par M. Saudan et son collègue Lionel Kiener. »
Si la solution développée le CSEM et ses partenaires, augure d’avancées très intéressantes dans le spatial, notamment pour obtenir de meilleurs performances sur le marché des petits satellites, fusées ou modules spatiaux tels que l’ISS, elle vise aussi de nombreuses autres applications sur Terre, en particulier dans les systèmes de réfrigération pour des applications industrielles et grands publics.
Par sa capacité à produire et combiner avec précision des formes très complexes, l’impression 3D montre un grand potentiel dans les applications de gestion thermique. On pense notamment aux échangeurs d’air et de chaleur, des dispositifs cruciaux pour de très nombreux secteurs comme l’aérospatiale, l’automobile, et l’énergie.
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