Ce qui aurait pu sembler être un poisson d’avril il y a encore quelques années, est aujourd’hui une réalité. Quelques mois après qu’une start-up ait réussi à faire décoller une fusée presque entièrement imprimée en 3D, on apprend que du bacon imprimé en 3D est désormais disponible à la vente dans 400 magasins Carrefour en Espagne. Une révolution signée Cocuus et Foody’s, deux entreprises espagnoles de Navarre, qui se sont données pour mission de proposer des alternatives à la consommation viande. Des substituts d’origine végétale, jugés plus sains et respectueux de l’environnement.
Spécialisé dans les alternatives végétales, Foody’s est un groupe agroalimentaire détenu par le groupe Enhol qui s’est fait connaître pour ses produits novateurs tels que des burgers et des nuggets à base de plantes. L’intégralité de sa gamme de produits est fabriquée à partir de produits végétaux. Un crédo différent de celle de son partenaire Cocuus, qui lui développe des solutions industrielles pour la production d’aliments sur-mesure, mais qui ne sont pas forcément d’origine végétale.
La prouesse de cette entreprise qui développe des imprimantes 3D depuis plus de 15 ans, est qu’elle est parvenue a développer une technologie de bio-impression qui lui permet de reproduire l’aspect de la viande telle que nous la connaissons, soit uniquement à partir de cellules animales, ou sur une base végétale ou cellulaire. Un savoir faire très pointu dont Foody’s s’est saisi pour produire un nouveau bacon 100 % végétal.
C’est ainsi qu’au mois de mars de cette année, Cocuus a implanté la première ligne d’imprimantes biologiques 3D dans les installations de Foody’s à Tudela. Une première mondiale marquant une avancée significative pour la fabrication industrielle d’analogues de viande et de poisson. Désormais prête à fonctionner dans n’importe quelle entreprise agroalimentaire, cette plateforme industrielle de 2 millions d’euros, serait capable de fabriquer « en 5 minutes un type de lard, là où il faut cinq ans pour produire pour un cochon. »
« Notre bacon végétal est le premier d’une série de produits nettement supérieurs à ceux connus jusqu’à présent dans la catégorie »
Bien sûr, imprimer des produits mimétiques dont l’aspect et la texture sont aussi proches que possible de ceux de la vraie viande, est un défi de taille. Qui plus est, Foddy’s avait pour ambition de proposer un bacon qui soit plus sain que celui d’origine animal. Non seulement son produit imprimé en 3D ne contient qu’un tiers de la matière grasse présente dans le bacon traditionnel, mais les graisses qu’il renferme sont des acides gras insaturés. Des graisses considérées comme plus bénéfiques pour la santé que les graisses saturées présentes dans le gras de porc.
Parmi les ingrédients utilisés par Cocuus pour imprimer son bacon, l’entreprise révèle la présence d’huile d’olive et de girasol, de pommes et de carottes. Une savante combinaison (sans gluten ni soja) permettant de reproduire le goût et l’apparence du bacon. La ressemblance ne s’arrête pas là, puisque Cocuus explique que lorsque le bacon végétal est cuit, tout comme le vrai, chaque partie de la viande réagit différemment à la chaleur de la poêle.
« Notre bacon végétal est le premier d’une série de produits nettement supérieurs à ceux connus jusqu’à présent dans la catégorie » a déclaré Patxi Larumbe, fondateur et PDG de Cocuus « Il s’agit d’une technologie qui changera pour toujours la manière de produire des aliments à grande échelle, sains, savoureux et durables pour le monde. Cette technologie aspire à révolutionner la science alimentaire en proposant des solutions disruptives pour l’industrie ».
Bien sûr, ce bacon végétal ne cible pas exclusivement les végétaliens ou les végétariens, mais vise également à offrir de nouvelles options alimentaires à ceux cherchant une alimentation plus saine. Néanmoins, pour les amateurs de bacon, les bienfaits nutritionnels ne suffisent pas. C’est pourquoi Cocuus et Foody’s se sont efforcés de reproduire fidèlement la texture et le goût authentiques du bacon traditionnel.
Au delà du goût et des bienfaits nutritionnels, les deux partenaires partagent la conviction que la transformation du mode de production est essentielle pour répondre aux besoins croissants de la population, anticipant une éventuelle pénurie de protéines. L’autre ambition de leur produit bioimprimé, est de proposer une alternative à la viande issue de l’élevage industriel, à la fois plus respectueuse de l’environnement, en réduisant les émissions de CO2 et l’impact sur le climat, tout en éliminant le problème de la maltraitance animale. Enfin, la personnalisation offerte par l’impression 3D ouvre la voie au développement d’aliments présentant des niveaux nutritionnels pouvant être adaptés aux besoins des consommateurs.
Disponibles à l’achat dans plus de 400 magasins Carrefour espagnols depuis le début du mois, les tranches de bacon sont conditionnées dans des barquettes de 120 g et sont proposées à des prix annoncés particulièrement « compétitifs ». Comptant parmi ses actionnaires la société Cargill, la plus grande entreprise agroalimentaire du monde, Cocuus a l’ambition d’étendre sa technologie d’impression 3D industrielle à d’autres produits alimentaires. D’autres type de viandes, dont des morceaux entiers, mais aussi des poissons tels que du saumon, soit en l’utilisant comme matière première soit des produits protéiques végétaux, soit des cellules cultivées en bioréacteurs.
Sur ce créneau, rappelons d’ailleurs qu’une autre première mondiale a eu lieu en septembre dernier. Une start-up autrichienne du nom de Revo Foods a lancé la commercialisation d’un saumon imprimé en 3D. À l’instar de Cocuus, l’entreprise s’est appuyée sur l’impression 3D pour créer des substituts de poisson d’origine végétale. Baptisé « The Filet », son produit est le premier aliment imprimé en 3D au monde à atteindre les rayons des supermarchés. Pour l’heure uniquement disponible en Autriche, ce saumon végétalien produit 77 à 86 % de CO2 en moins que le saumon ordinaire, mais aussi 95 % d’eau douce en moins.