Après avoir explorer les solutions de nos champions français Nanovia, Lynxter et Namma, pour cette quatrième journée consacrée aux usages de l’impression 3D pour la maintenance, cap cette fois-ci sur le géant américain Stratasys. Fort de son portefeuille technologique et matériaux le plus complet pour l’impression 3D polymère, l’inventeur de l’impression 3D FDM ne manque pas d’arguments pour pallier aux faiblesses de la fabrication traditionnelle pour produire plus efficacement et à moindre coût des pièces détachées. Pour explorer les nombreuses possibilités offertes par sa technologie, j’ai interviewé Yoann Nicolle, Ingénieur d’Application chez Stratasys.
« une pièce habituellement livrée en 6 à 8 semaines peut être imprimée en moins de 24 heures, ce qui évite des arrêts de ligne coûteux »

Yoann Nicolle
Bonjour Yoann, pour ceux qui découvriraient l’impression 3D, pourriez-vous nous présenter Stratasys et l’étendue de son portefeuille technologique ?
Stratasys est l’un des pionniers et leaders mondiaux de l’impression 3D industrielle polymère. Depuis plus de 30 ans, nous développons des solutions de fabrication additive à la fois fiables, innovantes et adaptées aux environnements de production les plus exigeants. Stratasys est d’ailleurs le pionnier de la technologie FDM.
Notre portefeuille technologique est aujourd’hui l’un des plus étendus du marché. Il comprend :
- FDM (Fused Deposition Modeling) : idéal pour des pièces robustes, fonctionnelles, et à grande échelle.
- PolyJet : une technologie multi-matériaux très précise, parfaite pour les prototypes visuels et les pièces complexes.
- SLA (stéréolithographie) et P3 (Programmable PhotoPolymerization) : pour des pièces lisses et ultra-précises.
- SAF (Selective Absorption Fusion) : pour la production en série de pièces thermoplastiques avec des performances industrielles.
- Et enfin DLP (Digital Light Processing), avec notre gamme Origin, dédiée aux applications de production haute résolution.
Cette diversité nous permet d’adresser des secteurs variés comme l’aéronautique, l’automobile, le ferroviaire, la santé ou encore l’industrie lourde.
« La technologie FDM s’est imposée comme une référence en matière de maintenance industrielle »
Parmi ces technologies, lesquelles se sont particulièrement illustrées dans le domaine de la maintenance ces dernières années et pourquoi ?
La technologie FDM s’est imposée comme une référence en matière de maintenance industrielle. Elle permet de produire rapidement des pièces de rechange robustes en matériaux thermoplastiques techniques comme l’ULTEM™ 9085, le Nylon 12CF ou encore le PC-ABS.
Son principal atout, c’est sa capacité à produire des pièces durables et sur mesure, directement sur site, avec une grande fiabilité mécanique et thermique.
Plus récemment, SAF et P3 sont venues compléter cette offre, notamment pour des besoins de plus grande précision, de production en volumes ou de résistances chimiques spécifiques.
En nous précisant le contexte, pourriez-vous nous donner quelques exemples d’entreprises ayant tiré parti de votre technologie pour fabriquer des pièces de rechange ou de réparation ?

Siemens Mobility tire parti de la technologie FDM de Stratasys pour ses pièces de maintenance et d’outillage
Absolument. Voici quelques exemples concrets :
Dans le secteur ferroviaire, Siemens Mobility utilise l’impression FDM pour produire des pièces de rechange de trains, comme des boîtiers de connectique, des supports ou des caches, parfois indisponibles chez les fournisseurs.
Ces pièces, souvent de 20 à 40 cm, sont fabriquées en PC-ABS ou ULTEM™ 9085 pour leur tenue mécanique et à la chaleur.
« La société a su exploiter la fabrication additive pour créer des outils et pièces de rechange 100% imprimées en 3D mais aussi des pièces hybrides »

RUSTIN utilise sa Fortus 450mc pour créer des outillages internes de ligne de production. La photo montre un outil d’optimisation de poids réalisé en résine ULTEM™ 9085.
Citons également Rustin, une entreprise française aujourd’hui leader dans la conception, le développement et la production de systèmes d’étanchéité avancés en caoutchouc et en silicone pour un large éventail d’applications.
La société utilise l’impression 3D FDM de Stratasys pour accroître l’efficacité de ses applications et d’introduire plus d’agilité dans la production sans compromettre les normes de qualité strictes qu’elle a. « Surtout, nous avions besoin de quelque chose qui nous permettrait de développer des outils de ligne de production rapidement et à moindre coût, des guides de coupe et des gabarits aux pinces – sans avoir besoin d’usinage. »
La société a su exploiter la fabrication additive pour créer des outils et pièces de rechange 100% imprimées en 3D mais aussi des pièces hybrides, en combinant des matériaux haute performance tels que la résine ULTEM™ 9085 et le FDM Nylon12 CF™ (polymère chargé de fibres de carbone courtes) aux métaux.
« UPSA réalise des économies de coûts jusqu’à 95% sur ses pièces de production »

UPSA réalise des économies de coûts jusqu’à 95% sur ses pièces de production. Ici un exemple de pièce imprimée en ULTEM 1010 pour un dispositif de marquage laser.
DHL, de son côté, imprime en interne des pièces pour ses systèmes de tri automatique : des guides de convoyeurs, des clips ou des brides de fixation. Grâce à la technologie SAF, ils obtiennent des pièces résistantes à l’usure en PA11 en quelques heures.
Dans l’industrie pharmaceutique, les Laboratoires UPSA utilisent l’impression 3D FDM dans le cadre de l’amélioration continue sur leur site de conditionnement. Ils exploitent notamment la Fortus 450mc pour fabriquer des supports caméras, des supports marquages, des enceintes d’aspiration, des boîtiers de protection et confinement de laser.
Ils ont également améliorer l’ergonomie et la stabilité de certaines pièces tels que des doigts de poussée ou bien des bras d’ouverture d’étui. L’entreprise a considérablement réduit ses activités avec des fournisseurs extérieurs en produisant leurs pièces de maintenance et de rechange sur site.
« L’entreprise a constaté une impulsion de la créativité de ses collaborateurs et des coûts de pièces de rechange compétitifs »
Dans le secteur du dispositif médical, le site de Medtronic à Trévoux utilise également la FDM pour palier à la sous-traitance coûteuse et des équipements d’usinage vieillissants.
Combinant des systèmes fiables avec des matériaux validés y compris en salle blanche tel que l’ASA et l’ABS, leur ont permis de développer de nouvelles méthodes de tests de dispositifs, de développer plus d’outils de contrôle en production et d’itérer rapidement et à moindre coût leur ergonomie.
L’entreprise a constaté une impulsion de la créativité de ses collaborateurs et des coûts de pièces de rechange compétitifs par rapport à la sous-traitance employée auparavant.
Quels bénéfices concrets ont été observés par ces entreprises ?
Les bénéfices sont souvent spectaculaires. En voici quelques-uns :
- Réduction des délais : une pièce habituellement livrée en 6 à 8 semaines peut être imprimée en moins de 24 heures, ce qui évite des arrêts de ligne coûteux.
- Économie de coûts : certaines entreprises ont constaté jusqu’à 60 à 80 % d’économies sur le coût unitaire d’une pièce, surtout lorsqu’il s’agit de petites séries ou de pièces obsolètes.
- Réduction des stocks : plus besoin de stocker des centaines de pièces. La fabrication à la demande permet de libérer de la surface et de réduire les immobilisations financières.
- Flexibilité : les pièces peuvent être modifiées en quelques clics, testées, améliorées, et adaptées sans refaire un outillage.
Comment une entreprise confrontée à des défis quotidiens en matière de maintenance, tels que des ruptures d’approvisionnement, des délais de livraison trop longs ou des coûts trop élevés, peut-elle évaluer si l’impression 3D constitue une solution adaptée pour la production de ses pièces de rechange ?
Nous recommandons une phase de diagnostic avec les ingénieurs d’application Stratasys. Cela passe par l’identification des pièces critiques ou problématiques : délais trop longs, fournisseurs non réactifs, pièces obsolètes ou très coûteuses.
Ensuite, nous accompagnons l’entreprise pour évaluer :
- La faisabilité technique (dimensions, matériaux, contraintes).
- Le potentiel économique (coût à la pièce, fréquence de remplacement, coûts cachés).
- Et la rentabilité à moyen terme.
- Nous proposons également des benchmarks (ou proofs of concept), autrement dit des pièces échantillons qui permettent à nos clients de tester la valeur de la technologie sur un cas concret.
« Cette approche progressive permet à nos clients de bâtir une feuille de route adaptée et durable pour intégrer la 3D à leur chaîne de valeur »
Quelles alternatives proposez-vous pour ceux qui hésiteraient à internaliser votre technologie ?
Chez Stratasys, nous accompagnons nos clients avec une gamme de solutions flexibles adaptées à leurs besoins et à leur maturité en fabrication additive. Pour ceux qui souhaitent démarrer en douceur, nous collaborons avec un réseau de partenaires de production certifiés, capables de réaliser des pièces à la demande avec un haut niveau de qualité.
Nous proposons également des offres clé-en-main incluant la formation, l’assistance à distance, ainsi que des options de location ou de financement évolutif.
De plus, notre équipe d’experts peut intervenir en amont pour optimiser la conception des pièces en vue de leur fabrication additive.
Cette approche progressive permet à nos clients de bâtir une feuille de route adaptée et durable pour intégrer la 3D à leur chaîne de valeur.
« D’ici quelques années, on verra de plus en plus d’usines, d’entrepôts ou de sites de maintenance capables de produire eux-mêmes en local »
En tant qu’acteur aux premières loges du marché, comment voyez-vous l’avenir de l’impression 3D dans le domaine de la maintenance ?
L’avenir est très prometteur. Avec la montée en puissance des jumeaux numériques, de la digitalisation des pièces détachées, et des chaînes d’approvisionnement décentralisées, la fabrication additive devient un outil incontournable.
Surtout si l’on prend en compte le contexte mondial actuel, avec les épidémies, les conflits régionaux et la hausse des tarifs d’importation imposés par l’administration Trump, la fabrication additive a toute sa place dans une industrialisation plus consciente et agile.
D’ici quelques années, on verra de plus en plus d’usines, d’entrepôts ou de sites de maintenance capables de produire eux-mêmes en local, à la demande, des pièces personnalisées, fiables et traçables.
La maintenance prédictive, couplée à l’impression 3D, ouvre aussi la voie à une gestion proactive des pièces, avec des catalogues digitaux toujours prêts à être imprimés.
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