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Aleph Farms fait de l’impression 3D de viande dans l’espace

(crédits photo : Aleph Farms)

Pourrait-on un jour se nourrir grâce à la bio-impression 3D ? C’est en tout cas l’ambition d’une start-up israélienne du nom de Aleph Farms spécialisée dans la culture de viande in vitro. Implantée à Rehovot, un quartier technologique et scientifique à 30 kilomètres de Tel-Aviv cette entreprise utilise la culture cellulaire combinée au bioprinting pour recréer de la viande. En 2018, elle était la première à fabriquer un steak à partir de cellules souches présentant la texture et l’apparence d’un boeuf entier sans abattage, et à un coût (50 dollars la lamelle de quelques grammes) défiant les prototypes de viande réalisés jusqu’à présent.

Comme d’autres laboratoires dans le monde, Modern Meadow aux USA ou Novameat en Espagne, Aleph Farms se donne pour objectif l’impression de viande destinée à la consommation humaine. La société se dit convaincue que sa viande « clean meat » peut jouer un rôle dans la réponse à la demande mondiale croissante en protéines animales, sans oublier bien sûr les problématiques environnementales liées à l’élevage intensif.

Récemment la jeune pousse est même parvenue à faire la preuve de son concept au-delà des limites terrestres, plus précisément à bord de la Station Spatiale Internationale. Les astronautes de l’ISS ont réussi à produire artificiellement des tissus de bœuf prélevés et cultivés sur Terre par Aleph Farms, puis imprimés dans l’espace grâce à une bio-imprimante 3D du fabricant russe 3D Bioprinting Solutions. C’est la première fois qu’une petite quantité de viande artificielle est créée en conditions d’apesanteur. « C’est une petite bouchée pour l’homme, mais une grosse bouchée pour l’humanité », a déclaré Ioussef Khessouani, du laboratoire moscovite 3D Bioprinting Solutions. « C’est pour nous une première expérience de collaboration scientifique internationale dans l’espace. »

Une viande imprimée en 3D qui présenterait les mêmes qualités nutritionnelles qu’un steak traditionnel

Le procédé développé par Aleph Farms débute par le prélèvement de plusieurs cellules issues de découpes de viande : des cellules musculaires, des adipocytes pour le stockage de la graisse, et des fibroplastes qui assurent la cohérence de la viande imprimée. C’est à partir de ces cellules qu’est créée la bio-encre qui sert de matériau pour l’impression 3D. Très importante, la dernière étape correspond à la maturation des tissus imprimés. Durant cette phase les cellules assemblées vont évoluer et interagir ensemble de manière à former un tissu. L’objectif est de se rapprocher le plus possible de la texture de la viande et de ses qualités organoleptiques. Celle d’Aleph Farms présenterait les mêmes qualités nutritionnelles qu’un steak traditionnel, c’est à dire avec les mêmes vitamines (A, D, B12, et du fer) que dans la viande rouge.

Aleph Farms explique que le processus d’impression de la viande dans l’espace est plus rapide que sur la Terre. L’absence de microgravité a pour effet de permettre au tissu de se développer sans supports et dans toutes les directions. Cette première expérimentation dans l’espace tend à prouver qu’il est possible de cultiver de la viande, et ce, même dans des conditions extrêmes. Le besoin de produire de la nourriture de manière autonome pour les missions spatiales de longues de durée, pourrait être en partie solutionnée par l’impression 3D.

Selon Aleph Farms il faudra encore deux ans avant de pouvoir fabriquer sa viande à un niveau industriel. Si l’aspect financier ne semble pas être un obstacle aux ambitions de la jeune pousse (en mai dernier le géant américain de la viande Cargill est entré au capital à hauteur de 12 millions d’euros) la réglementation européenne en est un. En tant que viande issue de culture cellulaire, pour obtenir une autorisation de mise sur le marché ce genre d’aliment innovant doit répondre à des exigences de sécurité similaires à celle d’un médicament.

Alexandre Moussion