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L’impression 3D au coeur du nucléaire : une technologie d’impression 3D validée par USNC

En bleu, une reproduction de l'enveloppe en céramique du combustible (bleu) qu'Ultra Safe Nuclear Corp espère imprimer en 3D

En bleu, une reproduction de l’enveloppe en céramique du combustible qu’Ultra Safe Nuclear Corp espère imprimer en 3D (crédits photo : USNC)

De part notamment les normes très strictes de sécurité qui régissent le nucléaire, la fabrication additive appliquée à ce secteur, se limite encore essentiellement à accélérer les phases de prototypage. Pour autant, on la voit de plus en plus s’immiscer dans la création des pièces d’utilisation finale plus performantes, grâce à des géométries complexes impossibles avec les techniques traditionnelles.

Aux Etats-Unis, une nouvelle avancée particulièrement excitante nous est rapportée par USNC (Ultra Safe Nuclear Corporation). Entreprise américaine de premier plan spécialisée dans l’énergie nucléaire, celle-ci a récemment donné son feu vert pour une méthode d’impression 3D dédiée à la fabrication de composants métalliques de réacteurs nucléaires. Il serait question d’une technologie fournit par l’Oak Ridge National Laboratory (ORNL), qui combinerait l’impression 3D métal par jet de liant à un processus d’infiltration chimique. Situé comme son nom le présume à Oak Ridge, dans le Tennessee, ORNL est un laboratoire pluridisciplinaire de science et de technologie officiant pour le Département de l’Énergie des États-Unis (DOE). On se souvient qu’en 2020 le laboratoire avait tiré parti d’une technologie additive par dépôt de matière sous énergie concentrée, qui avait permis de réaliser un démonstrateur de réacteur nucléaire en acier inoxydable.

C’est dans le cadre de son programme “Transformational Challenge Reactor Demonstration” (TCR), qui vise à imaginer des systèmes d’énergie à la fois plus rapides, efficaces, et moins chers, que le laboratoire américain a développé sur nouvelle technologie d’impression 3D. La spécificité de cette dernière est qu’elle permettrait d’imprimer du carbure de silicium pour concevoir les composants du coeur des réacteurs. Une capacité qui intéresse fortement USNC, celle-ci ayant mis au point un réacteur thermique et électrique qui fonctionnera sur le principe de fission nucléaire.

« procédé de fabrication additive sophistiqué qui permet d’imprimer des matériaux réfractaires présentant une résistance très élevée contre la chaleur extrême et la dégradation »

ORNL, U.S. Dept. of Energy

Crédits photo : ORNL, U.S. Dept. of Energy

En cours d’autorisation aux Etats-Unis et au Canada, ce réacteur du nom de « Micro Modular Reactor (MMR) » utilise en son coeur du carbure du silicium. Un matériau crucial puisque servant d’enrobage et de gainage du combustible. Cette céramique bien que dotée de résistance à la chaleur très élevée et aux radiations, présente néanmoins deux défauts : son coût très élevé, mais surtout le fait d’être difficilement usinable. C’est là qu’intervient la technologie additive d’ORNL, en donnant d’une part, plus facilement accès à ce matériau, et en autorisant des formes plus complexes.

« La nouvelle technologie utilise un procédé de fabrication additive sophistiqué qui permet d’imprimer des matériaux réfractaires présentant une résistance très élevée contre la chaleur extrême et la dégradation, sous la forme de composants possédant une géométrie complexe utilisés dans les conceptions de centrale modernes. » Explique Kurt Terrani, Executive Vice President d’USNC. « USNC utilisera cette méthode pour encourager le développement et le déploiement d’installations de production d’énergie basées sur le nucléaire, qui soient commercialement compétitives et simples d’utilisation. Cette technologie est idéale pour fabriquer des composantes structurels et des composants nucléaires destinés aux concepts de réacteurs avancés d’USNC.» À ce titre, USNC indique vouloir construire son usine de fabrication de combustible d’essai (Pilot Fuell Manufacturing, PFM) sur l’East Tennessee Technology Park (ETTP) d’Oak Ridge afin d’exploiter à proximité le savoir-faire de l’ORNL.

En France, l’adoption de la fabrication additive dans le nucléaire tend également à croître. AddUp, la joint-venture de Fives et Michelin spécialisée dans l’impression 3D métal, collabore depuis trois ans avec l’organisme CEA dans le but de développer la fabrication additive dans le domaine de l’énergie. Quant à Framatome, leader international de l’énergie nucléaire, depuis 2015 cette filiale d’EDF se concentre sur la fabrication additive de composants d’assemblages de combustible en acier inoxydable et en alliage à base de nickel.

En janvier 2021, Framatone a réalisé une première percée technologique en imprimant des composants en uranium–molybdène et uranium–silicium. Fabriqués dans son laboratoire de recherche et d’innovation de CERCA, sur le site de Romans-sur Isère (CRIL), ces composants pourraient ouvrir la voie au développement de plaques combustibles en uranium métallique. Pour les réacteurs de recherche, d’une part, mais aussi dans le domaine de la santé pour fabriquer les cibles d’irradiation qui sont largement utilisés par les hôpitaux dans le diagnostic du cancer.

Le français collabore également avec ORNL. Leurs recherches ont déjà donné déjà lieu a l’installation de quatre composants de sûreté imprimés en 3D qui ont été introduits dans une centrale nucléaire aux États-Unis au printemps 2021. Ces composants habituellement fabriqués à partir de pièces de fonderie permettent de fixer le boitier à l’assemblage de combustible d’un réacteur à eau bouillante (REB). Un boitier qui sert à canaliser le fluide réfrigérant au travers de l’assemblage de combustible. Imprimés sur une Concept Laser M2 de GE Additive à partir d’acier inoxydable 316, les composants ont été installés et sont maintenant en fonctionnement à l’Unité 2 de la centrale nucléaire Browns Ferry en Alabama. Les fixations métalliques resteront opérationnelles pour une durée de six ans avec des inspections régulières pendant cette période.

Alexandre Moussion