Saviez-vous que l’on pouvait faire de l’impression 3D de laiton ? Je veux dire autrement qu’avec des moules ou des filaments chargés ? Directement ? Et bien oui… Un fabricant italien du nom de 3D4MEC, propose des machines capables de faire cela. Spécialisée dans la création d’imprimantes 3D personnalisées pour des cas d’utilisation et des alliages spécifiques, cette entreprise a développé une technologie à fusion laser permettant l’impression directe de pièces en laiton.
Jusqu’à présent, les seules méthodes permettant de réaliser des pièces en laiton de manière additive, étaient : soit de manière indirecte en réalisant des moules en cire perdue, soit en utilisant des filaments chargés en particules métalliques (environ 60 %).
L’inconvénient de la première solution est qu’il s’agit d’un processus assez long en plusieurs étapes, et qui autorise moins de complexité géométrique. Pour la deuxième, les filaments limitent la teneur en métal. Après les opérations de déliantage et frittage nécessaire à l’évaporation du liant et la fusion des particules métalliques, la densité de la pièce finie est souvent inférieure à celle obtenue par fusion laser directe, où la densité est proche de 100 %. À cela s’ajoute des contraintes de retrait, mais aussi de de propriétés mécaniques moins adaptés à la réalisation de pièces critiques.
À juste titre, 3D4MEC affirme qu’il s’agit de la première imprimante 3D laiton LPBF. À ma connaissance il s’agit même de la seule… Plusieurs raisons à cela. La première réside dans la difficulté à imprimer cet alliage qui comporte une importante quantité de cuivre (environ 70%) pour le reste en zinc. D’où son surnom de cuivre jaune.
Conséquence, ce métal réfléchit si bien la lumière, qu’il renvoie par la même occasion une grande partie de l’énergie nécessaire à la fusion. Si 3D4MEC reste discret sur sa technologie, il se pourrait bien qu’elle ait adopté une approche similaire pour solutionner l’impression 3D de cuivre, c’est à dire en utilisant des lasers spéciaux (vert ou bleu) qui absorbent mieux la lumière que les lasers rouges couramment employés par les imprimantes 3D métal. Ne réfléchissant plus les longueurs d’ondes, la poudre peut être fusionnée.
La deuxième raison à mon avis pour laquelle il n’existe pas d’autres solutions sur le marché, est que les fabricants de machines AM ne considèrent probablement pas ce matériau comme une priorité dans leur développement. De par son coût plus élevé et de ses propriétés mécaniques inférieures par rapport à d’autres matériaux comme l’acier inoxydable ou l’aluminium, le laiton intéresse un peu moins l’industrie.
« Les imprimantes sont ‘Open Powder’ : vous pouvez utiliser n’importe quel fournisseur de poudre que vous souhaitez, sans aucune contrainte. »
Sur ses capacités matériaux justement, on apprend que l’imprimante 3D laiton de 3D4MEC, la « 3D4BRASS », est qualifiée pour l’impression de poudre CuZn42. Connu aussi sous le nom de CW510, cet alliage de laiton sans plomb avec 42% de zinc et 58 % de cuivre, offre de bonnes propriétés mécaniques, mais aussi une bonne usinabilité, ce qui permet des ajustements de précision ou des finitions de surface. Il trouve plusieurs applications dans le domaine de la robinetterie et de la plomberie, mais aussi celui de l’ingénierie électrique et mécanique pour des composants tels que des connecteurs.
« Les imprimantes sont ‘Open Powder’ : vous pouvez utiliser n’importe quel fournisseur de poudre que vous souhaitez, sans aucune contrainte. » indique 3D4MEC. « La 3D4BRASS peut traiter des alliages spéciaux tels que l’Ecobrass, pour garantir que votre production soit conforme aux normes internationales. »
Si 3D4MEC dédie pour l’heure sa technologie à la production de prototypes fonctionnels, les derniers développements de l’entreprise suggèrent que cela pourrait évoluer vers d’autres applications plus ambitieuses, notamment des pièces d’utilisation finale.
En effet, la société italienne a récemment annoncé qu’elle collaborait avec l’Institut de recherche Fraunhofer pour développer un système de surveillance optique in situ pour son imprimante 3D. Le duo a été rejoint par Thetascan, une entreprise allemande spécialisée dans les solutions de numérisation personnalisées. Connue notamment pour avoir développé un scanner permettant de vérifier et diagnostiquer certains des composants électroniques des voitures, l’entreprise propose également un système de surveillance pour l’impression 3D. Basée sur l’utilisation de caméras haute résolution, cette solution co-développée avec MTU Aero Engine, permet de surveiller minutieusement chaque couche durant la fabrication.
« La collaboration avec Fraunhofer IAPT et Thetascan est une formidable opportunité pour 3D4MEC de renforcer notre engagement en matière de recherche et développement, un domaine dans lequel nous avons beaucoup investi ces dernières années. » s’est félicité Fabrizio Marino Corsini, directeur général de 3D4MEC. « Grâce à cette synergie, nous souhaitons développer des solutions de fabrication additive personnalisées pour des matériaux spéciaux, répondant aux besoins spécifiques de nos clients et du marché. »
« Avec 3D4MEC, nous avons trouvé un excellent partenaire pour aller de l’avant et faire progresser le développement de la technologie de tomographie optique »
3D4MEC ajoute que le système permet d’assurer un suivi précis des lasers et du flux de gaz, tout en aidant à minimiser les variations entre les machines en coordonnant leur étalonnage. Ce module, conçu comme un boîtier complémentaire, pourrait être installé sur divers modèles d’imprimantes 3D.
« Avec 3D4MEC, nous avons trouvé un excellent partenaire pour aller de l’avant et faire progresser le développement de la technologie de tomographie optique au-delà de l’état de l’art au moyen d’une intégration étendue des capteurs et de la fusion de plusieurs technologies de détection pour un contrôle qualité basé sur les données dans la fusion laser sur lit de poudre. Le projet bénéficiera également de nos recherches antérieures sur la tomographie optique avec Thetascan. » conclut Dennis Jutkuhn, assistant scientifique pour la surveillance in situ et le contrôle des processus au L-PBF de Fraunhofer IAPT.
Au regard des avancées que pourrait permettre ce nouveau développement, 3D4MEC est un acteur à surveiller de près. Il sera intéressant de suivre les capacités nouvelles de sa technologie et applications qu’il apportera dans les années à venir. Vous serez bien sûr tenus au courant.
*crédits de toutes les photos : 3D4MEC