Si le luxe est un secteur réputé pour perpétuer le savoir-faire artisanal d’exception nécessaires à la conception de pièces remarquables, il n’en reste pas moins ouvert aux nouvelles technologies. Motivés par le besoin d’innovation et celui de satisfaire une clientèle en demande de plus d’originalité, d’éthique, et de personnalisation, les acteurs de cette industrie ont compris l’intérêt qu’il y avait à concilier artisanat et innovation.
Parmi les technologies dont les maisons de luxe se sont le plus saisies pour se démarquer, il y a celle de l’impression 3D. Un procédé au fonctionnement très différent des techniques traditionnelles qui offre à ses designers et ses clients une liberté de conception incomparable, sans limite de créativité. La complexité de forme n’est pas le seul atout de la fabrication additive. Les fabricants et marques de luxe s’intéressent à ses autres bénéfices. Des délais de production plus courts, mais aussi une capacité à répondre à leurs préoccupations environnementales en fabriquant localement et en réduisant drastiquement le gaspillage de matière première.
En France, l’un des ambassadeurs les plus engagés et novateurs de cette révolution 4.0 se nomme EAC (Europe Accessoires Concept). Spécialisé dans les ornements et les pièces métalliques de luxe, ce fabricant français basé à Bourg-de-Péage dans la drome, tire parti de l’impression 3D depuis 2015. Une technologie qui a révolutionné la manière de travailler de cette PME. L’aventure de la 3D a commencé avec une première imprimante de type résine qui a été introduite dans ses bureaux d’études pour faire du prototypage. Les pièces imprimées ont alors permis la création d’empreintes de moules pour obtenir des pièces finales plus complexes et détaillées.
Il y a deux ans, l’entreprise a pris un nouveau virage en investissant dans l’impression 3D métal industrielle. Une technologie fonctionnant selon un procédé à jet de liant à laquelle elle a recours pour faire de la fabrication additive en métal. Cela concerne aussi bien des pièces prototypes que des pièces de production. Pouvant se targuer d’être l’une des très rares entreprises à posséder cette technologie en France et dans le monde, EAC multiplie les collaborations.
Particulièrement inspirante, la dernière en date concerne une très belle pièce de maroquinerie. Connue pour ses sacs de luxe en cuir de veau upcyclé et cuir de poisson Made in France, Nodie’s, une marque de maroquinerie française écoresponsable haut de gamme, a fait appel au savoir-faire d’EAC pour réaliser le fermoir métallique de ses collections Isaac et Isee.
En bon partenaire industriel, EAC a apporté son expertise technologique pour soutenir Nodie’s tout au long de la phase de développement et de production. Le cahier des charges consistait à concevoir un fermoir made in France pour ses sacs à main écoresponsables et durables, en respectant des critères rigoureux tels qu’une empreinte carbone réduite, une gestion maîtrisée des coûts de production, et surtout, une qualité exceptionnelle.
Pour créer ce fermoir luxueux, EAC explique avoir d’abord utilisé une imprimante 3D résine DLP (Digital Light Processing) qui lui a permis de valider le prototype et tester l’assemblage. Un premier exemplaire qui a permis de confirmer le design de ladite pièce incluant un mécanisme d’assemblage intégré et le logo de la marque.
Incarné par le système de production SHOP System de chez Desktop Metal, la technologie d’impression 3D métal d’EAC a, quant à elle, servi à la production en série du fermoir. Rappelons que contrairement aux procédés à fusion laser sur lit de poudre, le Metal Binding Jetting (MBJ), fonctionne par jet de liant. Cette méthode consiste à étaler une fine couche de poudre métallique sur un plateau, qui est ensuite agglomérée par des millions de gouttelettes de liant projetées par une tête d’impression. L’opération est répétée couche après couche jusqu’à l’obtention de la pièce finale.
La dernière étape consiste à placer l’objet imprimé dans un four de frittage pour éliminer le liant et fusionner les particules métalliques. Grâce à ses 70 000 micro-buses capables de déposer des gouttelettes de 1,0pL (picolitre) à 1600 dpi, ce système permet une résolution incroyablement fine.
« Il n’y a plus aucune limite pour explorer les capacités de la technologie et l’adaptabilité au monde du luxe ou précision technique et esthétique doivent absolument cohabiter »
En plus de sa qualité et sa vitesse d’impression supérieures, l’avantage de cette technologie est qu’elle ne nécessite aucun support, et que contrairement à la fusion laser, les pièces fabriquées sont superposables. Ce qui permet donc d’optimiser la production en imprimant plusieurs pièces en même temps. Pour réaliser le fermoir de Nodie’s, EAC indique avoir opté pour un acier inoxydable 316 L. Un métal dont on connaît ses bonnes propriétés mécaniques, notamment sa très bonne résistance à la corrosion et aux températures élevées. Enfin, pour la couleur, on apprend qu’un traitement de surface en ruthénium nickel free a été effectué sur la pièce.
Comme Nodie’s a pu le constater, les géométries complexes et précises que l’impression 3D peut rendre avec exactitude, ne sont pas son seul atout. La marque française a pu également observer comment sa liberté géométrique, synonyme d’optimisation topologique, permettait d’obtenir des pièces finies plus légères, à résistance égale d’une production plus conventionnelle, car permettant de les concevoir moins massivement.
« Tous les jours, notre bureau d’études en concertation avec nos designers cherchent de nouvelles idées et de nouvelles niches de marché luxe pour illustrer la puissance de la révolution technologique que représente la fabrication additive métal. » Abonde EAC . « Il n’y a plus aucune limite pour explorer les capacités de la technologie et l’adaptabilité au monde du luxe ou précision technique et esthétique doivent absolument cohabiter. »
La fabrication de ce fermoir souligne un tas d’autres effets bénéfiques de l’impression 3D sur le plan économique et écologique. Le premier étant de pouvoir s’affranchir des contraintes de temps et de coûts imposées par les techniques classiques (ici d’usinage) habituellement employées. EAC estime la réduction des délais de conception d’environ 50 %.
Dans le cas présent, il n’a fallu que 10 jours pour avoir un prototype fini (dessin, impression, finition inclus). L’une des raisons est que l’impression 3D offre une grande liberté d’itérations. Le fait de s’appuyer sur un modèle 3D, permet des modifications et ajustement rapides, sans coûts supplémentaires.
« Cette technologie permet de calculer la quantité de matière nécessaire pour une utilisation au plus juste, éliminant les déchets liés à l’usinage. »
L’utilisation d’un fichier numérique signifie également une suppression de plusieurs étapes de la supply chain traditionnel. Non seulement la production de la pièce est accélérée et se fait en flux tiré, mais cela supprime également les contraintes de coûts et d’encombrement associés à la gestion des stocks. Faciliter une production plus locale et axée sur la demande contribue également à réduire les émissions associées au transport et à la logistique. Associé à une diminution significative de la consommation de matériau, cela se traduit par une réduction notable de l’empreinte carbone.
« Notre empreinte carbone liée au transport est moindre car les pièces sont produites localement donc le transport n’est plus nécessaire…. EAC se positionne sur une approche de production à la demande, donc zéro stockage et zéro gâchis, toutes les pièces sont utilisées. » commente EAC avant de conclure : « Cette technologie permet de calculer la quantité de matière nécessaire pour une utilisation au plus juste, éliminant les déchets liés à l’usinage. »
Sous la direction de Patrick Chouvet depuis plus de 20 ans, EAC et son équipe de 75 employés, compte parmi les acteurs les plus novateurs du secteur de l’ornement métallique de luxe. Forte de son savoir-faire mêlant habilement artisanat et nouvelle technologie, cette PME est en pleine croissance. En témoigne la création en 2022 par Patrick Chouvet du groupe EPHIE INDUSTRIES. Un groupe en constante évolution constitué donc d’EAC, mais aussi de Graindorge (traitements de surfaces sur plastique et metal) et Bouvier (signalétique) et qui regroupe plus de 200 collaborateurs pour un chiffre d’affaires de 24M d’€.