
Les membres de l’équipe de recherche du département de génie mécanique de l’UMass Amherst et du MIT, dirigés par Simos Gerasimidis (à gauche, debout) avec le patch imprimé en 3D (crédits photo : UMass Amherst )
En construction, impression 3D ne rime pas forcément avec béton et extrusion. Aux Etats-Unis, un pari audacieux a été relevé par des chercheurs. Une équipe de l’Université du Massachusetts à Amherst et du département d’ingénierie du MIT, a expérimenté avec succès la réparation in situ d’un pont routier en tirant parti la fabrication additive métallique.
Le test a plus exactement porté sur une technique sans fusion laser, dite de projection à froid. Une approche au fonctionnement bien différent des systèmes additifs sur lit de poudre, qui consiste le plus souvent à s’appuyer sur l’énergie cinétique pour pulvériser et faire fondre une poudre métallique sur un substrat. Sur ce segment naissant, deux fabricants se distinguent : l’Australien Spee3D et l’américain Titomic.
Dans ce cas précis, les chercheurs ont cherché à s’attaquer à un problème bien connu : le vieillissement des infrastructures. Aux États-Unis comme dans beaucoup d’autres pays, une grande partie des ponts ont été construits il y a plusieurs décennies et approchent aujourd’hui de leur fin de vie. La corrosion, inévitable sur les structures métalliques, fragilise peu à peu ces ouvrages. Des opérations de maintenance régulières s’imposent donc, jusqu’à parfois devoir nécessiter des remplacements complets.
Pour saisir l’ampleur de la problématique, selon le rapport 2025 sur les infrastructures américaines, au pays de l’oncle Sam, près de la moitié des ponts sont jugés en état seulement « passable », et 6,8 % sont même classés comme « mauvais ». Le coût estimé pour leur remise en état dépasse les 191 milliards de dollars. Dans le seul État du Massachusetts, environ 9 % des 5 295 ponts présentent des déficiences structurelles nécessitant des réparations, un besoin bien supérieur aux moyens financiers actuellement disponibles.
« Cette méthode s’est avérée efficace pour d’autres structures de grande taille comme les sous-marins, les avions et les navires, mais c’est la première fois qu’elle est appliquée à un pont »

Capture d’écran Youtube montrant la réparation du pont via un système de fabrication additive métallique par projection à froid
L’expérience conduite par les chercheurs a consisté à renforcer les poutres métalliques corrodées d’un pont test, à l’aide de la technologie de projection à froid. Une approche couronnée de succès qui leur a permis de réaliser les réparations sans avoir à démonter la structure, contrairement aux méthodes traditionnelles bien plus invasives.
L’autre avantage de cette technique est que les réparations peuvent être effectuées avec une perturbation minimale de la circulation. « Chaque réparation sur un pont nécessite de bloquer la circulation et de maintenir des contrôles de circulation pendant une durée considérable », explique Simos Gerasimidis, professeur associé de génie civil et environnemental à l’Université du Massachusetts à Amherst et l’un des principaux chercheurs du projet. « Cela nous permettra d’appliquer cette technique sur ce pont réel pendant que les voitures le traversent. »
avant d’ajouter : « Cette méthode s’est avérée efficace pour d’autres structures de grande taille comme les sous-marins, les avions et les navires, mais c’est la première fois qu’elle est appliquée à un pont. Les ponts présentent des défis uniques en raison de leur taille et de la nécessité d’amener l’imprimante 3D sur place. »
On apprend qu’une partie des travaux a également permis le développement de méthodes de numérisation LiDAR 3D pour remplacer les évaluations visuelles subjectives et chronophages. Les chercheurs peuvent ainsi identifier précisément la corrosion, élaborer un plan de réparation numérique et déposer le matériau uniquement là où c’est nécessaire.
« En combinant numérisation et dépôt précis de matériau, nous pouvons être très ciblés et dire : « Nous allons imprimer ici, ici et là, et nous allons prolonger la vie de ce pont de 10 ans », ce qui est énorme », conclut Simos Gerasimidis