Comme en témoigne son succès dans les fablabs, sur les sites de crowdfunding et les plateformes de fichiers 3D, l’impression 3D est particulièrement propice à l’économie collaborative. Si l’outil tente aujourd’hui à se démocratiser, nombre d’entreprises, notamment les TPE et PME, rechignent encore à s’équiper, réfrénées par le coût et l’utilisation des machines. Cette situation a favorisé ces dernières années, l’émergence de nouvelles solutions de mutualisation sur le marché, dont celle d’un certain Clotoo. Basée à Grenoble au sein de l’accélérateur de Start-up « Le Carré », cette jeune pousse fondée en 2015, a imaginé un projet collaboratif en réseau s’appuyant sur sa propre imprimante 3D. Co-fondateur de Clotoo, Rémy Oliel nous livre les tenants et aboutissants de ce nouveau réseau mutualisé prêt à tisser sa toile sur l’hexagone.
« Notre objectif est d’intégrer la fabrication additive dans un système collaboratif global où chaque acteur aura quelque chose à y gagner »
Rémy Oliel bonjour, pourriez-vous vous présenter ? Parlez-nous un peu de votre parcours et de votre cursus ?
Bonjour, j’ai 44 ans, je suis né dans le 8ième arrondissement à Lyon. Depuis tout jeune, j’ai toujours voulu être architecte, j’aime réaliser ce que j’imagine. A l’âge de 17 ans, j’ai travaillé dans une agence d’architecture pour pouvoir m’inscrire après l’obtention de mon baccalauréat à l’école nationale d’architecture de Grenoble. En 1995, je pars en Inde pour travailler dans une agence d’architecte spécialisée dans la conception 3D où j’y apprends les rudiments de la modélisation. En 1998 je collabore avec 3D studio max et en 2000 je suis diplômé Architecte DPLG.
Grâce à toutes ces expériences, l’agence parisienne de Christian de Portzamparc m’a donné la mission de modéliser l’opéra du Luxembourg. Enfin, en 2001, j’ai décidé de créer mon agence à Saint Egrève, près de Grenoble : Buildings and Love architecture, pour créer mes propres projets.
Aujourd’hui, je me lance dans une nouvelle aventure : Clotoo. Le projet de créer et de réaliser est finalement toujours présent mais à une nouvelle échelle et dans un environnement différent.
Avant d’intégrer ce projet, quel était votre rapport à l’impression 3D ?
Je connaissais très bien la modélisation en 3D et j’avais déjà monté des imprimantes REPRAP telle que la prusa i3. Je m’en servais pour certains éléments de maquettes.
Présentez-nous Clotoo. Comment est né ce projet et qui sont ses protagonistes ?
Tout à commencer lors de repas dominicaux en famille avec Romain CLOITRE, mon beau-frère. Nous voulions tous les deux monter un projet qui nous tenait à cœur, nous avions le goût d’entreprendre pour quelque chose de futuriste qui ne connaissait pas encore sa maturité sur le marché. L’idée est vraiment à double enjeu. Nous montons un projet collaboratif entre des designers et leurs produits et de l’autre côté des professionnels qui veulent imprimer pour eux ou pour d’autres membres du réseau.
« La machine s’autofinance »
Quel est votre modèle économique ? Quel est votre cible client ?
Notre modèle économique est simple. Nous proposons aux personnes intéressés de pouvoir s’éditer eux-mêmes sur notre réseau collaboratif. A ce moment-là, leurs fichiers appartiennent au cloud mais ne peuvent pas être copiés, nous leur offrons une opportunité mais nous leur garantissons aussi la sécurité de ce processus.
Nos machines sont destinées principalement à des TPE et PME qui peuvent imprimer pour leur propre compte à l’unité ou en pré série des pièces plastiques ABS mais ces imprimantes peuvent aussi être mises à disposition d’autres membres extérieurs faisant partis du réseau. En effet, si le propriétaire de la machine ne s’en sert pas tous les jours, pour la rentabiliser il l’a met à disposition du réseau et se voit à ce moment-là attribuer une rétribution. Par exemple, elle s’amortit financièrement sur 3 ans et demi si le propriétaire imprime 1 pièce par jour tous les jours sauf le week-end. La machine s’autofinance.
Notre objectif est en fait d’intégrer la fabrication additive dans un système collaboratif global où chaque acteur aura quelque chose à y gagner. Nous prélevons une commission de 10 % sur les ventes.
« nous travaillons sur un contrôle qualité optique capable de remonter les erreurs dans notre cloud… »
Votre projet repose en bonne partie sur la fiabilité de votre imprimante 3D. Présentez-nous votre machine.
En effet, nous proposons une machine fonctionnant sous la technologie FFF dénommée « Clotoo-L » (comme « tool » pour outil) qui permettra la réalisation d’objet identique d’une imprimante à l’autre avec un gage de qualité assuré. Pour répondre à cela, nous travaillons sur un contrôle qualité optique capable de remonter les erreurs dans notre cloud afin de stopper ou reprendre une impression défaillante. Pour nous assurer du bon fonctionnement du processus de fabrication, l’ensemble de notre imprimante est fabriquée et assemblée en France.
Notre machine fonctionne uniquement avec de l’ABS spécialement développé par notre partenaire pour notre imprimante qui nous garantit un résultat de coloration et d’impression unique et homogène sur l’ensemble de notre parc machine.
Son volume d’impression est d’un diamètre de 180mm pour une hauteur de 200mm. Sa vitesse d’impression est de 150mm/s.
« Notre système de coloration d’ABS unique permet une grande autonomie d’impression »
Quels sont les atouts et les limites de votre imprimante 3D par apport à l’existant ?
Notre machine Clotoo-L présente de nombreux atouts. En effet, c’est une machine qui dispose d’une solide enceinte métallique isolée thermiquement afin de maintenir les températures et de faciliter le confort acoustique des utilisateurs. Notre système de coloration d’ABS unique permet une grande autonomie d’impression et nous évite de se déplacer pour changer les bobines de filament. Notre machine, grâce à ses deux filtres à charbon et à aérosol nous protège du styrène, hydrocarbures aromatiques, ammoniac, et autres cyanures d’hydrogène… Il n’y aura donc aucune émanation lors de la fusion d’ABS contrairement à d’autres imprimantes 3D. De plus, en plus d’un certain esthétisme, elle se déplace partout et/ou peut être encastrée à un seul endroit selon votre choix. Quant à l’impression, Clotoo-L se connecte automatiquement au réseau et vos fichiers sont protégés de toutes copies ou transfert de données.
Par rapport aux autres imprimantes du marché, on relève quelques limites comme le sens d’impression qui requiert un dessin et un positionnement des pièces très précis. Au niveau de l’impression, la machine a une couleur par impression et le support en ABS est plus délicat à détacher pour récupérer le produit finit.
Les services d’impression 3D se font de plus en plus nombreux et certains sont déjà bien installés. On pense bien sûr à Sculpteo par exemple mais aussi à 3D Hubs… Comment vous positionnez-vous par apport aux acteurs existants ? Quels sont vos atouts ?
Face aux usines en lignes comme Sculpteo, nous proposons des pièces moins chères et produites par des entreprises proches de chez vous dans un délai inférieur à 4 jours et sans forcément avoir de frais de port. Face à 3DHUB, nous avons l’avantage de proposer un parc machine identique et de minimiser les erreurs liées à la couleur ou au mauvais format de fichier STL qui peuvent être aussi piratés.
En prenant l’exemple d’une commande, pourriez-vous nous donner un ordre de prix en la comparant aux techniques de fabrication traditionnelles ?
1- Prix concurrent direct : Pour 10 pièces minimum:
> 330 euros TTC/pièce soit 3300 euros TTC
> Leur délai est de 4 jours.
2- Prix Injection pour 1000 minimum :
> Prix du moule : 10 000 euros HT environ (attention ce modèle est difficilement réalisable en moule)
> Prix de la pièce a l’unité 80 centimes HT
> Livraison 150 euros HT soit 13 140 TTC pour l’ensemble
> Leur délai est de 8 semaines
3- Prix Clotoo à l’unité sans quantité minimale:
> Prix de la rétribution pour un propriétaire de Clotoo-L = 19 euros TTC
> Frais plateforme et transport = 8,33 euros TTC soit 27,33 euros TTC
> Notre délai est de 24h
Clotoo c’est donc un gain de temps mais c’est aussi un gain d’argent!
Aujourd’hui quel est l’état d’avancement de votre projet et quelle est votre feuille de route ?
Aujourd’hui nous attendons l’arrivée de nos machines dans nos locaux. Nous avons monté notre site internet pour la mise en ligne de pré-ventes avec des réductions pour les 100 premières machines achetées.
Dès le 17 mai jusqu’au 5 juin, nous serons présents à Paris lors d’un pop-up avec des designers qui présenteront leurs prototypes fabriqués par nos machines. Nous serons aussi en partenariat avec le festival D-days la semaine d’avant pour augmenter notre visibilité et notre notoriété sur le marché.
C’est vraiment l’occasion pour Clotoo de montrer ce que ses machines sont capables d’imprimer en réel mais aussi à distance en réseau avec l’utilisation de plusieurs machines dans un système de coloration unique.
La mise complète sur le marché des machines se fera fin 2016.
Un grand merci à Rémy Oliel ET à toute l’équipe de Clotoo. L’imprimante 3D Clotoo-L bénéficie d’une offre de lancement jusqu’au 15 mai 2016. Les 50 premières machines sont à -30 % soit 6300 € HT au lieu de 9000 €. Plus d’informations ici.
*tous les crédits photo : Clotoo