Des véhicules terrestres aux aéronefs, la fabrication additive continue d’infuser les pratiques de l’industrie de la défense. Ses nombreux avantages, de très grande agilité, de réduction des stocks et de coûts de production, trouvent une oreille particulièrement attentive auprès du secteur militaire. Soumis à des impératifs de réactivité et de dépenses de maintenance très importants sur les théâtres d’opération, la Défense intensifie ses investissements et collaborations auprès des entreprises d’impression 3D. L’armée Française n’est pas en reste, preuve en est cet arsenal de 50 machines dont l’école du Matériel et de la logistique de Bourges s’est récemment pourvue.
Mise à l’honneur dans le dernier discours du Président de la République Emmanuel Macron, l’impression 3D, fut un temps réduite pour l’essentiel à ses dangers, est enfin considérée par le pouvoir politique comme une réponse sérieuse aux différents défis de notre industrie. La récente visite ce 24 juillet, de la ministre des Armées Florence Parly, sur le site de Poly-Shape à Salon de Provence, renforce ce sentiment.
Acquis par le groupe AddUp en 2018, (joint-venture entre les deux groupes industriels français Fives et Michelin) Poly-Shape est un sous-traitant spécialisé dans l’impression 3D métal qui depuis 2018, travaille en étroite collaboration avec la Direction Générale de l’Armement. Le premier projet était la production additive de nombreuses pièces (en titane)) pour un drone de combat, le Neuron, développé sous l’égide de la DGA par une alliance européenne comprenant Dassault Aviation (maître d’oeuvre), Thales, Saab (Suède), EADS-CASA (espagne), Alenia Aeronautica (italie) et RUAG (Suisse). Les objectifs de ce démonstrateur sont de pouvoir exécuter une mission automatisée d’une durée de 100 minutes à 100 km de sa base d’opération, être un engin furtif dans le domaine de la signature radar et infrarouge.
« nous utilisons également la technologie DED qui elle permet de réparer une pièce ou d’y ajouter des fonctions qui vont allonger l’espérance de vie de la pièce »
Son président Julien Marcilly a accueilli la ministre et a présenté les divers projets confidentiels ou non sur lesquels les experts de Poly-Shape travaillent pour l’armée. Il a été question par exemple du projet publique “Turbine ZR“, développé avec l’Onera qui concerne la réalisation d’une mini-turbine fiable et efficiente pour l’appareil volant « Flyborad ». Le second projet non confidentiel se nomme « JOSEFA » pour “Jonction de structure en fabrication additive“. Les machines additives sont souvent limitées en taille et les pièces qui en sortent également. Poly-Shape travaille actuellement, avec le TRA-C et Thales Alenia Space sur un procédé de soudure de pièces imprimées en 3D.
“Les avantages de la fabrication additive sont nombreux. Comme la technologie PBF (powder bed fusion) nous permet de fusionner de la poudre métallique uniquement la poudre métallique nécessaire, il est possible de créer des pièces aux formes complexes, plus légères, et aux performances mécaniques et thermiques supérieures. Et nous utilisons également la technologie DED (Directed energy deposition) qui elle permet de réparer une pièce ou d’y ajouter des fonctions qui vont allonger l’espérance de vie de la pièce“ a expliqué Stéphane Abed, fondateur de Poly-Shape et Directeur de la stratégie d’AddUp
Le dernier projet présenté est issu des travaux de recherche réalisés par le groupe AddUp, dont Poly-Shape est un des éléments fort depuis deux ans. AddUp et son partenaire CESI (réseau de campus d’enseignement supérieur et de formation professionnelle) ont développé un concept d’usine intégrée et transportable baptisé « Anywhere Additive Factory ». Cette unité de fabrication additive regroupe dans un seul espace sécurisé toutes les opérations nécessaires pour la production de pièces à la demande : stockage de la poudre, conception et fabrication des pièces, nettoyage, usinage et traitements thermiques.
Modulaire, autonome et transportable, cette mini-usine est un outil de production idéal pour les opérations dans des milieux isolés. Réduire les stocks emmenés à bord des porte-avions pour favoriser la production des pièces directement sur place et faciliter ainsi la maintenance. En imprimant sur place et à la demande, la gestion de stock de pièces associées aux équipements militaires est grandement simplifiée et permet une économie financière et humaine notamment lors de missions à l’étranger.
A la suite de cette visite, la ministre des Armées a reconnu la pertinence de la fabrication additive métallique pour le secteur militaire en particulier et pour l’industrie moderne en général. Elle a encouragé les dirigeants de Poly-Shape à garder leur degré d’exigence et de performance pour traiter les aspects militaires et par extension stratégiques de cette technologie d’avenir.