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Quand Thomas Pesquet emporte de l’impression 3D Made In Bretagne à bord de l’ISS

Thomas Pesquet en tenue de son scaphandre spatial

Thomas Pesquet en tenue de son scaphandre spatial (© ESA/NASA/VALCARCEL Josh, 2021)

Voilà maintenant 4 jours que Thomas Pesquet et ses trois coéquipiers sont entrés dans la Station Spatiale Internationale. Premier européen à voler à bord de la capsule Crew Dragon, le spationaute français sera chargé, en plus de ses obligations en temps que commandant de l’ISS pour un mois et de maintenance, de mener plusieurs expériences scientifiques à bord de l’ISS. Selon la branche CADMOS (pour Centre d’Aide au Développement des Activités en Micropesanteur et des Opérations Spatiales) du CNES, ce sont au moins douze expériences auxquelles celui-ci participera pendant ses six mois de mission Alpha.

Celle qui nous intéresse particulièrement s’appelle « Renewable Foam », une expérience qui consistera à utiliser des matériaux de protection réutilisables, biodégradables ou comestibles, dont l’objectif, conformément aux attentes de Thomas Pesquet, est de remplacer les traditionnelles mousses pétrosourcées inutiles une fois à bord de l’ISS. Ce qu’on sait en revanche un peu moins, c’est que les dites protections ont été imprimées en 3D, qui plus est par des ingénieurs français en Bretagne. Ces derniers appartiennent à la plateforme ComposiTIC, un plateau technique basé à Ploemeur (56), spécialisé dans le R&D polymères et composites, via des procédés automatisés à technologie robotisée de placement de fibres.

Soutenue par l’Université de Bretagne Sud et de l’ENSTA Bretagne, cette structure dispose d’une expertise et d’un vaste parc machine qui lui permettent de développer, tester et caractériser des composites innovants, parmi lesquels des matériaux d’impression 3D durables. On pense notamment au fameux Istroflex, un filament biosourcé à base de coquille d’huître développé avec le fabricant Nanovia (22). La dernière collaboration connue entre les deux bretons s’appelle FILSLIT, un projet particulièrement intéressant qui vise à développer des matériaux d’impression en fibres de carbone continues à partir de déchets issus de l’aéronautique.

Panneaux PHA imprimées en 3D par ComposiTIC

Panneaux PHA imprimées en 3D par ComposiTIC (crédits photos ComposiTIC/UBS)

La plateforme morbihannaise explique avoir été missionnée il y a un an et demi par le groupe Jean Hénaff et la société vannetaise Innovons à 360°. Le cahier des charges non seulement imposait que la protection soit biodégradable, mais qu’elle puisse aussi résister aux chocs et vibrations du décollage d’une fusée. Pour créer son filament d’impression 3D, le choix de l’entreprise Lorientaise s’est donc porté sur le PHA (polyhydroxyalcanoates) un matériau issu de la fermentation bactérienne, donc organique.

L’équipe de ComposiTIC explique avoir réussi par des méthodes de design DfAM, à concevoir une structure alvéolaire souple permettant d’optimiser le poids et la résistance de la pièce. Au total ce sont une vingtaine de panneaux qui ont ainsi été imprimés en 3D, pour créer 4 boîtes. Tandis que l’une a servi à envoyer dans l’ISS le bandeau de sommeil de l’expérience « Dreem » qu’utilisera Thomas Pesquet, les autres protègent le reste du matériel scientifique. Une fois utilisé, le plastique pourrait par exemple alimenter une imprimante 3D après avoir été fondu, ou bien servir de substrat de culture pour faire pousser des plantes.

Le deuxième élément imprimé dans le cadre du projet Edible Foam, est un caisson de protection dont les parois en mousse comestible renferment des gâteaux placés à l’intérieur. L’objectif étant toujours de diminuer les déchets tout en optimisant les charges et offrant aux astronautes une autre source de nourriture potentielle. Protégés avec une technique d’emballage spécifique développée par la société Guelt (Quimperlé), plusieurs mets sucrés rembourrent ainsi le démonstrateur, dont le fameux pain d’épice si cher à Thomas Pesquet, mais aussi de la madeleine et du pain de Gênes.  « Au départ, nous avons testé une protection entièrement consommable, mais cela manquait de rigidité face aux vibrations simulées d’un lancement. Nous l’avons améliorée en introduisant au milieu le composé blanc recyclable. » Précise Alain Maillet, responsable de cette expérience préparée en vue de la mission Alpha de Thomas Pesquet. Le caisson ne sera pas consommé par les astronautes durant cette mission mais par d’autres missions ultérieures. Quant aux douceurs, celles-ci n’ayant pas été homologuées par les agences spatiales européennes, seule la résistance aux chocs et aux vibrations sera testée.

Alexandre Moussion