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Create it Real : le spécialiste de l’impression 3D à très grande vitesse !

une carte électronique pour accélèrer jusqu'à 5 fois la vitesse d'impression 3D

Si c’est presque devenu un poncif, ça n’en reste pas moins un fait établi, la vitesse de fabrication reste l’un des freins majeurs à la démocratisation de l’impression 3D. Une carence technique qui empêche l’adoption massive de cette technologie par le grand public, et qui refrène aussi beaucoup d’industriels soucieux de rentabiliser leur machine. Si certains modèles tels que l’Ultimaker 2 et la Creatr HS (300mm/s) parviennent à tirer leur épingle du jeu, la grande majorité pèche néanmoins par sa lenteur d’exécution.

Partie de cette problématique, une jeune pousse Danoise du nom de Create it Real a développé une solution pour accélérer l’impression 3D. L’entreprise déjà connue pour un logiciel de contrôle et de blocage de certains fichiers sensibles (notamment des armes à feu), a développé une puce capable de multiplier par 5 la vitesse d’impression ! Fasciné et intrigué par ce système pouvant faire passer une imprimante 3D de l’ombre à lumière, Primante 3D est allé à la rencontre de Jeremie Pierre Gay, fondateur de Create it Real. Français expatrié au Danemark, ce dernier nous dévoile les tenants et aboutissant de ce processeur « High Speed », à même de répondre enfin aux longues attentes des utilisateurs…

« …nous pouvons atteindre une vitesse d’impression de 450mm/sec et de déplacement jusqu’à 1000mm/sec. »

jeremie pierre gay

Jeremie Gay CEO de Create it REAL

Jeremie bonjour, pourriez-vous vous présenter à mes lecteurs et définir vos fonctions ? Quel a été votre parcours avant Create it Real ?

Bonjour je suis Jeremie Gay créateur et PDG de Create it REAL. Originaire de l’Oise, j’ai fait des études d’ingénieurs en télécommunication à Lille. Je suis ensuite parti pour une spécialisation en Multimédia à Aalborg au Danemark ou j’y ai trouvé un travail en tant qu’ingénieur logiciel sur téléphone portable. L’entreprise ou je travaillais c’est fait racheter par Motorola ou j’ai travaillé 3 ans et demi comme chef de projet, dirigeant activement le travail d’une équipe d’ingénieurs de 80 personnes.

Travaillant sur la conception de ma propre imprimante 3D dans mon temps libre et fasciné par le pouvoir de création que ces machines permettent, j’ai décidé de me lancé avec Create it REAL et d’ainsi aider à la création de cette nouvelle industrie qui a le pouvoir de booster notre créativité et les innovations des entreprises.

Présentez nous Create it Real et son équipe.

J’ai créé Create it REAL en 2009 pour regrouper des experts dans le domaine de l’impression 3D et offrir aux professionnels des services de R&D à la demande. Nous avons depuis innové dans plusieurs domaines tels que le développement de filaments conducteurs d’électricité à base de graphène. Nous travaillons aussi dans le domaine du bio-printing avec plusieurs partenaires, mais notre dernière invention majeure est notre 3D RTP V450, la première puce dédiée pour l’impression 3D, lancée en décembre 2013.

Nous sommes pour l’instant une petite équipe de 10 personnes venant de pays différents (France, Danemark, Bulgarie, Allemagne..) et d’horizons différents (experts en électronique, logiciel, mécanique, création 3D, développement de puce, systèmes embarqués…). Si tous se passe comme prévu, nous serons amenés à embaucher rapidement pour pouvoir supporter nos nombreux partenaires et développer tous les projets qui sont encore en attente.

puce 3D RTP V450

La puce 3D RTP V450

Vous avez mis au point un processeur qui permet à une imprimante 3D d’imprimer jusqu’à 5 fois plus vite. Quelle a été la genèse de ce système ?

En travaillant sur l’impression 3D, très vite nous nous sommes rendu compte que la vitesse d’impression allait être un frein à son développement. Nous avons donc décidé de focaliser nos ressources sur ce problème alors que nous aurions pu, comme beaucoup d’autres lancer notre propre machine à l’époque.

« …beaucoup de fabricants jouent sur l’ambiguïté autour de la vitesse… »

Qu’est-ce qui explique la lenteur de la plupart des imprimantes 3D actuelles ?

Le problème n’est pas dans la mécanique ou les consommables comme nous avons pu l’entendre sur beaucoup de salons. Le problème vient essentiellement de l’électronique, et d’ailleurs nous le prouvons avec notre puce 3D puisque nous pouvons atteindre une vitesse d’impression de 450mm/sec et de déplacement jusqu’à 1000mm/sec. Et je parle bien de 450mm/sec en impression car beaucoup de fabricants jouent sur l’ambigüité autour de la vitesse alors que la plupart imprime entre 50 et 100 mm/sec au maximum.

Comment parvenez-vous à atteindre une telle vitesse d’impression sans sacrifier pour autant la qualité de finition ?

Déjà, la puce que nous avons développée après 3 ans d’efforts permet de gérer les timings au niveau de la nanoseconde et non à la milliseconde comme sur une carte open source actuellement. Et Ceci change tout car nous avons aussi développé des algorithmes spécifiques afin de gérer les vibrations et le bruit généré par la vitesse. Enfin notre slicer maison est aussi optimisé pour tirer au maximum la puissance de notre plateforme, tout en conservant une qualité d’impression équivalente. Mais à durée d’impression équivalente, nous pouvons aussi augmenter la résolution (le nombre de couches) et donc avoir une plus grande qualité !

modèle One EVO

La One Evo de Dynamo 3D

Cette carte électronique est-elle compatible avec toutes les imprimantes ?  Quels modèles ont pu déjà bénéficier de votre système et quels sont les premiers retours ?

Nous pouvons adapter notre carte à toute imprimante 3D, mais nous vendons uniquement en OEM auprès de fabricants d’imprimantes. Nous avons plusieurs partenaires en cours d’intégration, et les premiers à sortir leur machine sont nos partenaires de Dynamo 3D. Une jeune société italienne qui a développé une très belle mécanique, dont la robustesse se prêtait justement à la haute vitesse. Vous pouvez précommander leur imprimante One-EVO directement sur leur site.

A qui s’adresse votre processeur ? Est-il disponible pour le grand public ?

Nous avons eu beaucoup de demandes du public pour vendre notre carte en ligne directement, mais ce n’est pas notre stratégie. L’impression 3D est encore complexe et notre société ne pourrait pas gérée directement un public qui aurait besoin de support pour intégrer notre produit. Nous avons donc choisi de nous adresser aux fabricants qui ont l’expérience et les ressources pour vendre en direct. Nous sommes un peu sur le business modèle d’Intel, qui a tout d’abord vendu ces puces exclusivement aux intégrateurs de PC. Nous verrons dans quelques années comme nous évoluons, et peut être lancerons nous une version « upgrade ».

Quelles sont vos ambitions avec ce système et quelles sont ses limites ? Jusqu’à quelle vitesse pensez-vous qu’il soit possible d’aller ?

Nous espérons bien sur pouvoir équiper un nombre important de fabricants d’imprimantes 3D, mais nous ne nous arrêtons pas là. Notre électronique qui pour l’instant est utilisée sur des machines FDM est aussi compatible SLA. De plus nous travaillons sur d’autres projets R&D pour différents clients, donc nous essayons de nous développer dans plusieurs domaines de l’impression 3D.

Les limites de notre système ? Pour l’instant l’électronique pousse plutôt les éléments mécaniques à leur maximum donc une nouvelle approche de l’impression FDM sera nécessaire à terme. Nous devons aussi améliorer les filaments utilisés, qui ne sont pas totalement adaptés à la vitesse, et enfin, nous devons en permanence améliorer nos algorithmes pour offrir une qualité d’impression toujours meilleure.

prototype imprimante 3D Platon

Imprimante prototype Platon

Pourriez-vous nous parler de Platon, votre imprimante 3D prototype ? Sera-t-elle un jour commercialisée ?

Ce n’est pas en projet pour l’instant mais peut le devenir rapidement à la demande d’un client. Pour l’instant nous nous en servons essentiellement comme support de développement et tester les limites de notre électronique et logiciel.

En 2013, Create it Real avait mis au point un programme qui permettait de détecter les fichiers 3D liés aux armes et de des bloquer. Pouvez-vous nous en expliquer le fonctionnement ?  Quelles sont vos ambitions avec ce logiciel ?

Oui effectivement, le système fonctionne comme un antivirus car basé sur une base de donnée d’objets reconnus dangereux, le programme permet de reconnaitre l’empreinte digitale de ces objets. L’ambition à l’époque était surtout de répondre à un besoin des fabricants de se déresponsabiliser par rapport à une éventuelle impression d’arme à feux sur leur machines en avertissant du danger et d’offrir aux utilisateurs une possibilité de verrouillage ou de contrôle parentale pour des objets potentiellement dangereux.

Dans le vaste écosystème de l’impression 3D, avez-vous d’autres projets ou développements en cours ?

En tant que laboratoire R&D, oui nous avons toujours des projets en cours qui feront avancer le monde de l’impression 3D. Notre équipe y travaille chaque jour, et j’espère pouvoir vous en parler plus en détail l’année prochaine ;-)

Tous mes remerciements à Jeremie pour sa participation à cette interview. Ci-dessous une vidéo comparative avec le modèle One Evo équipé de la puce et la One exempt de celle-ci.

*ensemble des crédits photo : Create It Real

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Alexandre Moussion