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Francéclat réalise 10 bijoux en or directement imprimés en 3D

900 millions de dollars. C’est le chiffre d’affaires estimé par le cabinet Smartech pour les dépenses mondiales de l’impression 3D dans la bijouterie à l’horizon 2026. Aujourd’hui largement utilisée par la bijouterie de luxe pour la fabrication de moulages à cire perdue, l’impression 3D jusqu’alors cantonnée aux résines photopolymères dans ce domaine, commence à pointer le bout de son laser pour l’impression directe de métaux très précieux.

Après le français VOLUM-e et sa magnifique reproduction en or 18 carats de l’Ange Pleureur, le Comité Francéclat a dévoilé des bijoux en or directement imprimés en 3D issus d’expérimentations menées autour de cette technologie. Comité Professionnel de Développement de l’Horlogerie, de la Bijouterie, de l’Orfèvrerie, de la Joaillerie et des Arts de la Table, cet organisme basé à Paris, dispose d’un plateau technique qui mène des études au profit des professions HBJO portant notamment sur les matériaux, le CAO et le prototypage rapide.

« Température du laser, composition de la poudre d’or atomisée… rien n’a été laissé au hasard »

Après plusieurs années de recherches à trouver les bons paramètres et standards de qualité correspondant à la profession, le laboratoire de recherche du Comité Francéclat a livré ses premières pièces : 10 bijoux d’exception composés de bagues, bracelets et de pendentifs. « Température du laser, composition de la poudre d’or « atomisée », hygrométrie de la pièce: rien n’a été laissé au hasard au fil de leurs expérimentations sur les machines (une allemande, une italienne) à leur disposition. » Apprend-t-on dans un communiqué AFP.

Exposées hier soir à Paris lors d’un événement professionnel, les pièces ont été réalisées à l’occasion d’un concours visant à imaginer un bijou complexe en or qui ne soit pas (ou très difficilement) réalisable avec les techniques classiques de fabrication, soit l’usinage et la fonte à cire perdue.

« On peut faire des bijoux qu’on ne pourrait pas réaliser avec des techniques traditionnelles »

Comme la fabrication additive l’a déjà démontré tant d’autres fois avant dans d’autres domaines, elle s’illustre également dans la bijouterie par ses géométries très complexes (alvéoles, entrelacs…), imprimées d’un seul tenant et avec une grande finition de détails. « On peut faire des bijoux qu’on ne pourrait pas réaliser avec des techniques traditionnelles: par exemple, pour deux anneaux entrelacés, on doit prévoir deux pièces séparées puis les assembler. » Explique Pascal Hély, directeur technique de Francéclat. « Avec la 3D, on réalise une pièce d’un seul tenant, tous les morceaux et leurs articulations sont imprimés dans le même temps. »

Si l’on ignore la nature exacte du procédé d’impression 3D utilisé, tout laisse à penser qu’il s’agit de la technologie SLM (Selective Laser Melting, ou fusion sélective par laser), technique développée par l’institut de recherche allemand Fraunhofer Institute ITL. Largement représenté sur le marché par les imprimantes 3D de l’allemand SLM Solutions, ce procédé consiste à créer des pièces par addition de couches par fusion totale des particules métalliques à l’aide d’un puissant laser. « Chacune des couches a été liquéfiée par un laser à 1.700 degrés: « elles doivent être homogènes, et le lien entre elles parfait. Mais au début de nos expérimentations, ça ressemblait plutôt à un gruyère !, » se remémore Pascal Hély.

« Il y a des sceptiques dans la profession, mais il suffit de voir les bijoux qu’on peut réaliser ! »

A l’issue du concours, deux bijoux ont été primés, dont un magnifique bracelet-manchette en or rose baptisé « Dune ». Constitué de 2000 couches d’or de 15 microns chacune, le bijou de 64 grammes a nécessité 12 heures d’impression et 3,5 kg de poudre d’or gris (75% d’or, 15 % d’argent et 10 % de cuivre). A ce sujet, Francéclat souligne la perte de matière réduite au minium grâce à l’impression 3D. Un atout non négligeable quand le cours de l’or fin s’affiche à 35 000 € le kilo. « Le « processus 3D » comprend encore beaucoup d’interventions manuelles, comme le polissage et les finitions; et la conception numérique implique aussi de la créativité humaine. Ce sont simplement de nouvelles possibilités d’expression. » Explique Davide Sher Davide Sher, auteur d’une récente étude sur le sujet pour le cabinet américain SmarTech Publishing.

Fort du succès de ses expérimentations, le Comité Francéclat envisage de construire une plateforme technologique pour que les sociétés viennent tester la technique, avant d’investir dans une machine dont le coût avoisinerait les 200.000 euros. « Il y a des sceptiques dans la profession, mais il suffit de voir les bijoux qu’on peut réaliser ! On n’en est qu’aux débuts, et c’est une révolution. Mais surtout, cette technologie ne va pas remplacer les techniques traditionnelles; elle ouvre d’autres horizons, » insiste Pascal Hély.

Alexandre Moussion