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Une technique d’impression 3D pour le bois développée par des chercheurs suédois

Souvent associée au plastique et au métal, la fabrication additive, de part la diversité de ses procédés, permet d’accéder à un panel de matériaux beaucoup plus large que les techniques traditionnelles. La céramique, le carbone, le verre ou encore le béton, sont quelques-uns des nombreux matériaux disponibles aujourd’hui avec cette technologie.

Dernièrement ce sont des chercheurs suédois de l’université de technologie de Chalmers qui ont développé une technique d’impression 3D capable de recréer la structure cellulaire du bois. Cette méthode pourrait ouvrir la voie à une fabrication plus écoresponsable du bois et une nouvelle génération de produits écologiques : des vêtements, des meubles, des emballages ou encore des produits de soins personnels, etc.

En réalité l’impression 3D de bois n’est pas nouvelle. Avec la démocratisation du FDM (dépôt de matière fondue) sont apparues ces dernières années toutes sortes de filaments plastiques chargés en particules de bois, de liège ou encore de bambou. Ce matériau s’est également invité dans un procédé plus inattendu, celui du frittage laser. C’est le spécialiste belge du service d’impression 3D Materialise, qui en 2015 avait lancé une poudre de bois imprimable selon ce procédé.

« Être capable de gérer l’orientation et la forme signifie qu’ils peuvent capturer ces propriétés utiles du bois naturel »

La technique mise au point par l’équipe de recherche suédoise reprend en fait le principe de la bio-impression 3D, méthode habituellement utilisée pour les tissus biologiques. Le matériau se présenterait sous la forme d’un gel de nanocellulose fabriqué partir de pâte de bois, auquel a été ajouté de l’hémicellulose, composant naturel dérivé de plantes qui agit ici comme un agent de collage.

Le code génétique du bois a ensuite été interprété et numérisé pour la fabrication additive afin de reproduire l’ultrastructure du bois à l’aide de bioimprimantes par superposition de gouttelettes. Cela inclut notamment les structures en nid d’abeille que l’on trouve dans le bois naturel.

« Cela signifie qu’à présent, la disposition des nanofibrilles de cellulose peut être contrôlée avec précision au cours du processus d’impression afin de reproduire l’ultrastructure souhaitable du bois. » Explique Paul Gatenholm, qui a dirigé cette recherche au sein du Wallenberg Wood Science Center de la Chalmers University of Technology. « Être capable de gérer l’orientation et la forme signifie qu’ils peuvent capturer ces propriétés utiles du bois naturel. »

« des emballages pourraient être conçus et fabriqués sur commande sans aucun gaspillage »

Selon les protagonistes des travaux, cette nouvelle technologie ouvrirait un champ nouveau de possibilités. Les produits à base de bois pourraient être conçus et « cultivés » sur commande, à une échelle de temps considérablement réduite par rapport au bois naturel. Les premières expérimentations menées par Paul Gatenholm et son équipe portent sur la réalisation d’un prototype pour un concept d’emballage innovant.

Celui-ci se composerait de structures en nid d’abeille, avec des parois dans lesquels les chercheurs seraient parvenus à encapsuler des particules solides. La cellulose ayant d’excellentes propriétés de barrière contre l’oxygène, cela signifie qu’elle pourrait être une méthode prometteuse pour la création d’emballages hermétiques pour les produits alimentaires ou pharmaceutiques par exemple. Des prototypes dédiés au domaine de la santé et du textile auraient également été expérimentés.

« La fabrication de produits de cette manière pourrait générer d’énormes économies en termes de ressources et d’émissions nocives », déclare-t-il. « Imaginez, par exemple, si nous pouvions commencer à imprimer des emballages localement. Cela signifierait une alternative aux industries actuelles, avec une forte dépendance des plastiques et des transports générant du C02. Les emballages pourraient être conçus et fabriqués sur commande sans aucun gaspillage ».

Pour Paul Gatenholm, les possibilités sont énormes. Non seulement l’impression 3D pourrait permettre de réaliser en une seule fois des formes géométriques impossible à obtenir avec les techniques classiques, mais surtout fabriquer le bois pour beaucoup moins cher. Certains étapes de fabrication comme le sciage, le rabotage ou le ponçage, mais aussi certains éléments de fixation (clous, chevilles…) deviendraient obsolètes.

L’impression de bois intéresse aussi le secteur de l’aérospatiale pour les longues missions. La technologie développée par l’université de Chalmers a été présentée lors d’un atelier à l’Agence Spatiale Européenne, et intégrée à un projet de Florida Tech et de la NASA pour tester les matériaux dans des environnements de microgravité. « La matière première des plantes est incroyablement renouvelable. Les matières premières peuvent donc être produites sur place lors de voyages spatiaux plus longs, sur la lune ou sur Mars. Si vous cultivez des aliments, vous aurez probablement accès à la cellulose et à l’hémicellulose », a déclaré Gatenholm. « Voyager dans l’espace a toujours été le catalyseur du développement matériel sur la Terre. »

Alexandre Moussion